8 Le Soleil de Colombie, vendredi 2 juillet 1982 Le Liban d'hier, d'aujourd’hui et de jadis LES FERMENTS DE LA REBELLION 1958 Les Chrétiens-Maronites eurent plus de puissance que les musulmans des diverses sectes, au fur et A mesure que aghacunles eke cela sur deux paliers: politique et financier. Financier, ils avaient pres- que tout entre leurs mains: institutions financiéres et bancaires, l’hdtellerie et le tourisme, les agences de représentations des plus grandes firmes américaines et européennes, les lieux de loisirs, cinémas, thé&tres, su- permarchés, la construction, etc. la liste est longue. Que reste-t-il aux autres? La péche, le commerce du bétail, les abattoirs, une partie de l’agriculture, la voirie Cet état de choses dura jusqu’en 1958, lorsque les nationalistes musulmans ‘et alliés se sentant frustrés sur une large échelle et lorsque le Président de la Républi- que S. Ex. Camille Cha- moun (maronite) ne voulut pas trop aligner son pays aux initiatives trop en faveur des arabes musulmans de la i Arabe, bien que le Li en fut membre, ces nationalistes et leurs suppor- ters se rébellérent en 1958. Les actes de terrorisme se multipliérent, le vandalisme, les assassinats, les enléve- ments, bref tous les actes sauvages qui constituent une rébellion. Les choses tourné- rent au plus mal, le Prési- dent de la République prit la décision de faire appel aux Etats-Unis. Ce fut l’envoi de 10.000 Marines et quelques vaisseaux de guerre. _ Cette démonstration de force eut son effet, mais attisa la haine des nationa- listes et alliés, déja 4 un stade avancé, envers les Améri- cains, mais l’ordre fut resto- ré, laissant des cicatrices. La faction musulmane ob- tint quelques avantages, mais pas suffisants pour cesser des attaques (verba- les) contre le statu quo exis- tant encore, celui d’un per- pétuel président maronite, pourquoi pas une juste alter- nance. POSITION DU LIBAN VIS-A-VIS DU MONDE ARABE Comme république arabe, le Liban partage certaines caractéristiques dudit mon- de, mais la faction chrétienne manifeste quelques réticen- ’ ces acertains niveaux, elle ne désire pas s’y intégrer aveu- glément et totalement, et ar- demment séculaire. Elle sent avoir plus d’affinités avec les pays de l'Europe, surtout la France, et cause. vention subséquente des Etats-Unis. : 1974-1975, LE LIBAN MEURTRIDANS SA CHAIR VIVE Depuis les sanglants évé- nements, toutes ses forces militaires et paramilitaires, décrites précédemment, se désintégrérent totalement par voie de désertion. Les Chrétiens déserteurs ler son identité — rejoignirent une formation paramilitaire désignée sous le nom de “Phalanges Chré- tiennes”, fondée de longue date par un grand sportif, Pierre Gemayel et un fin lettré, Georges Naccache, un brillant étudiant du Collége St. Francois Xavier, d’Alex- andrie (Egypte) que nous admirions tous. Devenu ingénieur au Mi- nistére des Travaux Publics, lorsque revenu a son pays natal, il montra son impé- tuosité sans frein, gifla le ministre francais, emprison- né par les Autorités Fran- gaises, alors administrant le Liban, pour ses attaques répétées contre ces mémes autorités, nationaliste liba- nais, co-fondateur d'un quoti- dien libanais d’expression francaise, sa lutte au vitriol contre un concurrent “La Syrie” de Georges Vayssié, un protégé des Autorités Frangaises. De chemine- ments en cheminements, de- venu ministre des travaux publics, mais cette fois liba- nais... Chargé des plus hau- tes missions, a fini sa vie dans la peau d'un Ambassadeur du Liban, a Paris, en 1970. Gemayel et Naccache avaient comme objectif, par le truchement de leur phalan- ge, de maintenir contre vent et marée, lidentité chré- tienne au sein d’un Liban de deux factions, ot elle com- mengait a s’éroder. Le mot “Phalange” est mal traduit de l’arabe, celui-ci n’impli- que pas le sens courant attribué aux phalanges fas-_ cistes connues en Europe. Pierre Gemayel, 80 ans, a abandonné la direction de STRUCTURE ETHNIQUE DU LIBAN Nous avons signalé que le Liban est une mosaique d’ethnies, par ailleurs pas trop nombreuses, qui. s’en- tendent sur une base confes- sionnelle flottante. Nous avons donné les pourcenta- ges respectifs. s Chré- tiens, ces Musulmans, qui sont-ils? D’od viennent-ils? Leurs origines? Il faut signaler que c’est dés le VIle siécle que les Chrétiens et les Musulmans persécutés se servirent des montagnes libanaises plus ou moins inaccessibles comme un lieu de refuge. Les Chrétiens: disons plu- tét les Maronites, du nom de deux saints, un saint Maron, ermite, né 4 Apaméa (Syrie). Son biographe Théodoret, Evéque de Cyr... dit qu'il mena une vie de priéres, d’abstinence, pour cela il convertit un temple paien en une église. Plus tard, un historien P. Dib situe son décés en l’an 410 de notre ére. Ses disciples formérent, autour du monastére érigé a sa mémoire, le noyau de l'Eglise Maronite. Un autre Saint-Jean Ma- ron, Patriarche au Liban, au Ville siécle, contribua au nom de Maronites pour les catholiques du rite oriental. Ces premiers Maronites s'établirent d’abord dans les plaines bordant le célébre fleuve l’Oronte, prés de !’ac- tuelle ville de Homs (Syrie). Longtemps ennemis des Druzes, des affiliés a l'Islam. son parti a son deuxiéme fils, Les Maronites parlent l’ara- Béchir. be. Ont des moeurs patriar- D’autres déserteurs chré- cales. Persécutés au Liban tiens rejoignirent le partide par l’occupant turc, pendant 2 hse —o Sn, Of. 7, dbs SeeN 1G 2 EN gf a wr, A7O JQ = _ RG Sawant, Sa dyed yy wi! 1b z bs r _ Deux types d’écriture arabe Yex-Président de la Répu- blique Camille Chamoun, et enfin, d'autres celui aussi d'un ex-Président de la Répu- blique, Soleiman Frangié. Ces trois formations para- militaires avaient des diver- gences de vues pour mener la lutte, mais leur devise “Liban, d’abord”. Cet état de choses ne pouvait continuer, trois camps c’est une preuve de faiblesse: les Phalanges de Gemayel n’ayant pas réussi & former un front ages glants: matés, les Phalanges eurent le pouvoir supréme pour lutter contre les Pales- tiniens de l’Organisation de ‘la Libération de la Pales- tine (O.L.P.) et leurs alliés, les musulmans dits progres-’ sistes de gauche... Ceux-ci ont recu dans leurs rangs, les déserteurs musulmans de feu l’armée libanaise. L’heure du changement du statu quo s'impose. Le Liban n’en peut plus, il lui faut, et rapidement, un consensus entre Chrétiens et Musul- mans, afin de rétablir l’enten- te séculaire, en dehors des Palestiniens. de 1’'0.L.P. et factions gauchistes. Oui, mais comment se débarras- ser de ces derniers, bien implantés sur leur sol, forte- ment armés de surcroit? : la Premiére Guerre Mondia- le. Ils se tiennent a la liturgie syriaque ou araméenne (la langue du Christ), traduite aussi en arabe. Les prétres, dans certaines circonstances, surtout exercant leur minis- tére dans des villages >erdus dans les montagnes, quoique catholiques, peuvent étre mariés. Les Maronites unis 4 Rome depuis le temps des Croisa- des disposent d'un Synode (Assemblée _—d’écclésiasti- ques), qui a fixé leur droit. canonique: ils ont un chef spirituel, un Patriarche dit d'Antioche, qui regoit, aprés son élection, la confirmation du St. Sidge. Les origines doctrinales de l’Eglise Maronite sont obscu- res, méme_ controversées. C’est au XIle sidcle, lors des Croisades, qu’ils s'approchée- rent de Rome et proclamé- rent leur allégeance. Souvent persécutés, soit par des Chrétiens de sectes rivales, soit par des Musul- mans quiles avaient dominés pendant certaines périodes de Vhistoire, ils durent aller vers le Sud, aux sources du fleuve Khadischa (Tripoli-Li- ban) dans les hauteurs de la montagne libanaise. De petits groupes de Ma- ronites s’établirent a Alep, la grande ville du Nord-Syrien et méme 4 I’Ile de Chypre. a ne ee een Leurs approches vers la France aboutirent a une tradition qui voulait que ce pays puisse “mettre le nez” dans leurs affaires. Il le fit bien et ne cesse de le faire, en y glissant un intérét pronon- cé pour son commerce. Ceci n’empécha pas que les chan- celleries anglaises, autri- chiennes, prussiennes, voire russes s’en mélérent a qui mieux mieux. Cependant les Anglais se penchérent osten- siblement vers les Druzes, puissants a l'époque, plus tolérants envers les Missions protestantes. Tt a Par Alexandre SPAGNOLO est un monument philosophi- que unique en son genre, par ses dogmes, ses préceptes moraux: il est la tradition, le fondement de la civilisation musulmane, la source unique du droit, de la morale, de la vie sociale; tout y est, réglant intégralement la vie du mu- | sulman a tous les niveaux, a telle enseigne qu’en Arabie Séoudite et les Pays du Golfe Persique, la loi coranique remplace les tribunaux, d’ail- leurs inexistants; le Roi est le juge supréme. Qui était Mohamed Ben Abdallah? Né 4 la Mecque ~ a4 Sm Au centre, la Kabaa qui abrite la Pierre Noire, trés vénérée: elle aurait été donnée & Abraham par Dieu. Les Musulmans ou Mahomé- tans ou Islamites: Les fidéles a la religion islamique du prophéte Ma- homet, dont le nom était Mohamed Ben Abdallah. Islam veut dire “Résigna- tion & la volonté divine”. La plus jeune des_ religions monothéistes, trés influen- cée par ses prédécesseurs, le Judaisme et la Chrétienté. Avant Mahomet, des popu- lations arabes du désert avaient des inclinations pour Vidolatrie, d'autres portées a croire aux prophétes, classés en “Grands” (dont Abra- ham, Jésus-Christ, Moise, etc., et les “Petits”, tous suivant les écrits et leur longueur, qu’on leur attri- buait. Une croyance prit corps, que Dieu décida d’envoyer sur terre un message qui ne fut pas “croche” comme on dit au Québec, qui signi- fierait aux hommes, ce dont ils ont besoin pour tre heureux dans leur monde et le suivant. A cette fin, le Seigneur jeta son choix sur un homme pieux nommé Mohamed (Mahomet) de la Mecque (Arabie) pour étre son prophéte. L’Archange Gabriel fut chargé de porter le message divin, sa deuxié- me mission sur terre: la premiére, l’'annonce a la Vierge Marie, qu'elle sera la mére du Sauveur. Une pa- renthése: les Musulmans re- . connaissent la Vierge Marie, sous le nom arabe “Sitt Mariam” ou Dame Marie. Le message divin, par l’Archange Gabriel, fut plus tard transcrit verset par verset (Sourates en arabe), chapitre par chapitre, 114 au total, le tout en un livre appelé Coran, de l’arabe Alcoran (lecture ou récita- tion), D’autres sources, dont Larousse, signalent qu’il fut dicté par l'Archange Ga- briel... En tout état de cause, ce deuxiéme message de l’Archange ne fut pas heu- reux pour le christianisme... © mais cela est une autre histoire. Nous devons reconnaitre honnétement que le Coran ‘tes, et (Arabie), entre les années 562-572 de notre ére de Villustre famille des Korei- chites. Orphelin de bonne heure, tour & tour, conduc- teur de caravanes, berger, se consacrant a la méditation, apanage des bergers, & une époque ot un courant d'idées juives et chrétiennes se ré- pandaient parmi les tribus arabes, exaltant la croyance d'un Dieu unique, condam- nant le culte des idoles. © Les historiens orientaux rapportent que chaque an- née, depuis lage de 25 ans a 45 ans, il allait passer un mois dans une caverne prés de la Mecque, ov il conversait avec des esprits célestes, ce fut le message de l’Archange Ga- ' briel... Son apostolat ne com- menga qu’a l’age de 40 ans. Ce mois de réclusion dans une caverne, de méditation, de jefine, prit le nom de Ramadan (le neuviéme mois du calendrier musulman adopté plus tard). La tribu de. Mahomet n’ai- ma pas ledit message cora- nique, craignant des change- ments drastiques de leur mode de vie. Lorsqu’il voulut enseigner publiquement sa doctrine, il subit les raille- ries et les moqueries de la part des habitants de la Mecque. Craignant le pire, Maho- met prit sa femme Kha- digea, son gendre Aly, époux de sa fille Fatima et son esclave Zeid, tous ses adep- uittérent furtive- ment la Mecque. Les Koreichites, en dépit Gos dena etem tin sUt Toy. celiien init Geniksdentetel d’avoir leur peau. Le groupe se rendit 4 Yatreb, ot il fut recu avec chaleur. Cette loca- lité fut depuis sanctifiée et prit le nom de Médine (Médi- nat-El Nabi) la ville du pro- phéte. Cette fuite épique fut appelée Hégire (fuite en ara- be), c’était en l’an 622 de notre ére. L’Hégire fut dé- clarée le premier mois de l'année du calendrier musul- man, toujours en vigueur. A la téte de 10.000 de ses disciples, Mahomet réussit, sans coup férir, a se rendre maitre de la Mecque. I renversa les idoles de la Kabaa. Mahomet n’arriva pas a convertir les Juifs, pourtant de la race sémitique comme les Arabes et les Syriens, de Sem, fils de Noé, tige de cette race, suivant la Bible, aurait vécu 600 ans... Mahomet eut l’audace de déclarer la guerre 4 l’Empe- reur Romain d’Orient Héra- clius, mais il mourut, en 682, & Médine; Héraclius fut vain- cu par son successeur et beau-pére. . Ce successeur, Abou Bakr, ami et beau-pére de Maho- met, qui devint le premier Caliphe d’Orient de I'Islam, titre pris par les souverains politiques et religieux de Empire musulman, ne vécut que deux ans aprés la mort de Mahomet, tout juste pour déclencher une bréche au sein de l’Islam par un schis- me et la création d’une secte dite Chiite, qui s’obstina a ne pas vouloir reconnaitre le Caliphe Abou-Bakr, comme le successeur de Mahomet, par contre elle opina pour Aly, le gendre. Les Chiites, devenus trés nombreux essaimérent au Liban-Sud et surtout une majorité imposante en Iran (ex-Perse), ils développérent certains rituels de leur cru, mais toujours sur la base de l'Islam. En peu de temps, l’Islam se répandit en Palestine, Syrie, Irak, Iran et Egypte. Plus tard, en Afrique du Nord, la Turquie, une partie de l’Inde, l’Espagne du sud, ot |’occu- pation musulmane dura 8 siécles apportant une civili- sation trés avancée; c'est dans cette partie que les intellectuels musulmans vont faire des recherches _ -parmi les merveilleux vesti- __ ges du passé arabe, nuls autres ailleurs. Si les Chrétiens gagnaient des adeptes a leur doctrine par la Croix, chez les Musul- _ mans, c’était le sabre: d'ail- leurs, ils disent en arabe “Dinn Mohamad amm bel seif” la religion de Mahomet s’érigea par le sabre: Le sabre figure sur le drapeau de l’Arabie Séoudite sous un verset du Coran, il figure aussi sur le drapeau de I'Iran. Saint-Thomas d’Aquin (1225- 1274), le célébre théologien, pére du “thomisme”, a farou- chement contesté dans sa “Summa contra Gentiles” lusage du sabre comme moyen d’endoctrinement. Plusieurs peuples.de ces pays étaient soit Chrétiens, soit Juifs; s'ils voulaient rejoindre I'Islam, ils étaient les bienvenus méme des fréres, sinon, ils pouvaient pratiquer leur croyance res- pective, 4 condition d’accep- ter la souveraineté musul- mane. Au fond, les Musul- mans étaient tolérants, ré- pondant ainsi aux préceptes du Coran. — os Cette derniére condition ne fut pas généralement acceptée, provoquant des — - guerres entre Chrétiens et Charlemagne. Musulmans. combattit les Musulmans en Espagne au VIIle siécle: plus Mahomet reconnaissait les délices du paradis, garantis- — sait une vie charnelle dans l’au-dela, aux bien méritants, et I'enfer pour les autres. (Asuivre) Les égoistes sont les seuls amis pour qui notre. amitié sott désintéressée. ffenry de Montherlant ~