Informations internationales Gouvemement contre «Washington Post» WASHINGTON . — En refu- sant d’accéder & la demande du gou- vernement américain d’ordonner au quotidien ‘Washington Post” de ces- ser de publier des documents secrets sur Tescalade et Tenlisement des Etats-Unis au Vietnam, le juge féde- ral Gerhard Gegell a déclaré qu’au- cune preuve tangible n’avait été avan- cée pour soutenir la these que ces ré- vélations pourraient porter préjudice a Etat. Le juge a également fait savoir qu'il avait tiré certaines conclusions avant de prendre sa décision, a Sa- voir: “La question primordiale concerne la préservation de la liberté de la presse lorsqu’elle est confrontée par un gouvernement qui cherche a res- treindre la publication de faits essen- tiellement historiques”’. : M. Gesell a également déclaré qu’il fallait se rendre a l’évidence et ad- mettre “que d’autres personnes sont sans doute en possession de ces docu- ments qui seront -probablement remis 4 d’autres journaux’”’. Entretemps, les débats concernant la publication des documents par le “New York Times” se sont poursulvis hier soir dans une cour fédérale de New York. Le juge Gurfein a pris l'affaire en délibére. La décision du juge Gesell de per- mettre au ‘Washington Post” de poursuivre la publication des docu- ments secrets influera, pensent les ob- servateurs, sur la position qu’adoptera le juge Murray Gurfeim au. sujet de Vinfluent .quotidien new-yorkais. Ainsi, prenant la releve du “New York Times” qui, par décision de jus- tice, adit suspendre la publication du rapport McNamara, le “Washington Post” a publie des. documents sur la politique des Etats-Unis vis-a-vis de l’Indochine lors de la conférence de Genéve de 1954 et dans les: mois précédents. Si les documents: divulgués par le “New York Times” mettaient surtout en cause Tadministration Johnson, cette fois-ci c’est l’administration reé- publicaine, le président Risenhower, le secrétaire @’Etat John Foster Dulles et le Conseil national de sécurité qui se trouvent sur la sellette. Dans l’arti- cle signé Chalmers Roberts, corres- pondant diplomatique chevromné, on n’apprend rien de trés nouveau, mais on y trouve contirmation de la ligne de politique trés dure que John Foster Dulles essaya d’imposer aux allies en Indochine et de lanticommunisme systématique gui l’animait. Le “Washington Post” a pris soin d'avertir les directeurs de journaus que l'étude sur laquelle est baseée sor article fait Fobjet d'une action judi- ciaire a New York contre le “New York Times.” Tl a ajouté que, de l’avis de Ja di- rection du “Post”, rien dans cet arti- cle ne peut étre dommageable aux Etats-Unis. Les documents du “Washington Post” metient en valeur plusieurs faits précis: 1) L’administration américaine a tout fait pour que la conférence de Ge- neve ne prévoit pas d’élections li- bres au Vietnam car elle craignait une victoire des communistes (elle souligne longuement a ce sujet le role trés important joué par l’'am- bassadeur de France Jean Chau- vel). ; 2) Ayant di céder sur ce point, elle a ensuite encouragé le président Ngo Dinh Diem a s’opposer a des élec- tions. 3) Des janvier 1954, le Conseil natio- nal de sécurité avait adopté comme politique générale la lutte contre le communisme partout en Asie du Sud-Est. : Mais le président Eisenhower, tout en approuvant cette doctrine, estimait qu'elle devait recevoir V'appui du Con- grés et des alliés des Etats-Unis. Dul- les tenta vainement de gagner les al- liés a ses théses et trouva les Britan- niques particuliérement réticents. De- tail révélateur, lorsque, le 19 janvier 1961, le président Eisenhower recut dans le salon oval de la Maison Blan- che son successeur John Kennedy, il lui dit que le Laos était la clef de PAsie du Sud-Est. Et le jeune prési- dent lui demanda: “Combien de temps faudrait-il pour envoyer une di- vision au Laos?” C’était le début de .Penlisement. De son cdté, le “Chicago Sun Times” a révélé que Richard Le juge Gerhard Gesell Nixon, lorsqu’il était vice-président d’Eisenhower, avait appuyé en 1954 Vemploi d’armes nucléaires tactiques et de forces américaines pour empé- cher letfondrement des positions fran- eaises en Indochine. Selon le journal, les articles qui nont pas été publiés par le “New York Times”; a la suite d’une ordon- nance judi iaire, portent précisement sur Je role de Nixon dans les débats au sein de l’administration Eisenho- wer au sujet de l’Indochie. M. Thomas B. Ross, correspondant du “Sun Times” 4 Washington, avait écrit a ’époque que des porte-parole de l’administration Eisenhower avaient déclaré que Nixon avait ap- puyé Vemploi d’armes nucléaires tac- tiques et le déploiement de forces américaines en Indochine. _~ Enfin, le Dr. Daniel Ellsberg, des services de documentation de l'Institut ’ de technologie du Massachusetts, qui serait la personne ayant fourni au “New York Times” les documents se- crets sur l’engagement des Etats-Unis au Vietnam et qui avait disparu de- puis plusieurs jours, a donnée de ses nouvelles pour la premiere fois hier. Fourniture d’armes a israel TEL-AVIV — L’impression prévaut, dans les milieux politiques is- raéliens, que la fourniture d’arme- ments ameéricains a Israél va se pour- suivre normalement. : ‘Toutefois, on nexclut pas dans ces mémes milieux certains ‘‘délais’’ d’or- dre technique concernant la prise de - nouveaux engagements par Washing- ton et certains retards “‘fondés’ sur des arguments d’ordre formaliste’’. Mais, estime-t-on, les fournitures s’ar- mes ne vont pas s’arréter pour au- tant. Telle est en tout cas la conviction des milieux politiques israéliens apres les conversations qui ont eu lieu cette semaine entre le secrétaire d’Etat ad- joint américain pour le Proche-Orient, M. Joseph Sisco, et d’éminentes per- somialités- juives -américaines, qui se sont déclarées “‘trés réconfortées” a l'issue de ces entretiens. Les Américains reconnaissent, souli- gne-t-on dans ces milieux, que les So- viétiques ont accru a la fois quantita- tivement et qualitativement leurs li- vraisons d’armes a l’Egypte et ren- forcé les capacités opérationnelles des forces égyptiennes. . Par ailleurs, les Etats-Unis, ajoute- t-on, voudraient renvoyer a une date ultérieure les négociations israélo-a- méricaines sur un engagement a long terme pour des livraisons militaires a Israél, préférant d’abord étre fixés sur les chances — si minces soient-el- les — d’un réglement partiel. En méme temps, les milieux politi- ques israéliens font état d’apprehen- sions quant a de nouvelles ‘pressions américaines sur Israél. Is justifient ces craintes par deux facteurs: d’a- bord, le penchant de Washington a se présenter en arbitre qui trancherait entre Israél et la R.A.U., et, ensuite, la nécessité, pour les Etats-Unis, de faire également appel aux bons offices de l’URSS sans lesquels aucun régle- ment n’est possible. [ A ce propos, on évoque a Jérusalem une série de questions récemment po- sées par Washinton au gouvernement israélien en ce qui concerne toutes les option et éventualités que Jérusalem envisage en vue d’un reglement par- tiel. L’objet en serait, selon les. mi- lieux politiques de la capitale israé- lienne, de ‘tater le pouls israélien”’ afin d’élaborer un document de tra- vail’ que 1é secrétaire d’Etat ameri- cain, M. William Rogers, présenterait aux deux adversaires d’ici la fin de l'année. C’est dans la perspective de Yélaboration d’un tel document que M. Rogers s’est déclaré optimiste sur la possibilité d’un réglent, conclut-on dans les milieux politiques israéliens.