r L'ACADEMIE S’EN VA: cette ren- contre-dialogue avec deux membres du jury de l’exposition de l’Académie royale des arts du Canada a provoque un certain remous. A un certain mo- ment, on a accusé Gaucher et Moli- nari de rechercher une publicité per- sonnelle, a l’occasion de |’exposition et les clans se constituaient: ceux qui étaient contre une attaque dirigée vers la RCA a JVoccasion de son ex- position, ceux gui acceptaient mais ne la trouvait pas fonder. L’exposition, d’ailleurs, permettait un tel combat: elle est difficile d’a- bord et rébarbative. Il faut dire ce- pendant que c’est souvent le fait de ces expositions-concours, dont le seul meérite est de ne permettre a |’ama- teur de découvrir un nouvel artiste. Exceptionnellement, ces expositions, lorsqu’elles sont restrictives, imposent un point de vue. Dans le cas présent, on connait l’intention de deux mem- bres du jury: ‘Montrer le meilleur et le pire’. Mais tout n’est pas termine. Il y a eu Il’accrochage, le cas Cou- vreur (Molinari hous en parlera), et surfout l1’article publié dans LA PRESSE de samedi dernier. Devant la polémique qui naissait, jai done invité Iles personnes impliquées : Léo Rosshandler, qui a fait pour le Musée des Beaux-Arts laccrochage, a décliné, aprés accepta- tion, l’invitation, préférant laisser par- ler par elle-méme l’exposition, consi- dérant qu’il n’avait pas a s’impliquer dans un probléme qui dépend surtout de la RCA (celle-ci a d’ailleurs com- pris le probleme en mettant sur pied un comité qui devra travailler a redé- finir une association qui a maintenant 91 ans d’age). Léo Rosshandler dé- eX Tom Dean: “Sans titre”. plore toutefois que le catalogue n‘aide pas a expliquer lexposition, disant mal comment s’est fait l’exposition et comment les oeuvres sont incluses dans la manifestation (méme, les noms des membres du jury n’y sont pas donnés). Quant a Molinari et Gau- cher, ils comprennent que le ton de l'entretien de la semaine derniére n’a pas aidé a4 comprendre leurs inten- tions. Ils y vont done plus posément, sans pour autant rechercher le com- promis. Gaucher: il faut agir I] est évident que l'idée d'une Aca- démie en 1971 es! a reconsiderer. La fonction d'une Académie (si l'on accepte l’idee) est a redéfinir et li mage éventuelle qu'elle projettera dan la société sera le facteur déterminant de son efficacite L'image actuecllement projetee par Lelle assez vivante pour tre de jouer son role ou uler (dans l’esprit du pu blic et des membres) en lacculant a Voici, pour n’en citer que quelques exemples: ae —Le “‘Clair-Obscur’’ de Knudsen-Men- ses. — ‘Crazy Corner’’ de Hitch-Tousignant. Au fait, les lampes de Hitch éclai- rent-elles les tableaux Day-Glo de Tousignant ou vice-versa? — ‘Cancelled-Goodbye’”’ de Couvreur- Dean. C’est ‘cute”, vu d’un angle spé- cifique. Cherchez-le. —‘Parthenon” de Igberge-Musée de Montréal. Oeuvre systémique: une colonne (du Musée) devant chaque nuage (de Laberge). —Il ne faudrait surtout pas oublier Voeuvre maitresse: le ““Remplissage” du mur principal de la Galerie 15, opposé au ‘Vide’ du mur principal de la Galerie 16. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de souligner tous les chefs-d’oeuvre d’ajoutage de ce casse-téte. Ce serait priver les spectateurs du plaisir (?) de leurs découvertes. Ces exemples, et bien d’autres, por- tent a réflechir sur les intentions de laccrocheur. Molinari: un geste social En acceptant ces fonctions sur le jury, j’ai voulu répondre a une possi- bilité de vraiment réorienter l’exposi- tion annuelle de l’Académie, de facon a rendre visible ce qui se fait au- jourd’hui et d’informer la collectivite de l’art actuel. Car a mes yeux, toute association qui s’appuierait sur ses structures et ses traditions pour monopoliser des ci- maises oU ne seraient défendus que des académismes serait une associa- tion profondément asociale. C’est pourquoi je trouve essentiel de m ‘opposer vigoureusement a la facon dont cette exposition a été présentée au public. Le représentant du Musee des Beaux-Arts qui a fait l’accrochage a tout fait en son pouvoir pour désa- morcer l’impact que pouvait avoir cetet exposition. Voici comment: 1—Le jury auquel j’ai participé pour lest du pays, regroupant les preuves des artistes du Québec, a insisté pour que ces oeuvres soient exposées de _ ah erage” ama 10 Daniel Couvreur: “Cancelled”, | -fagon séparée, afin que le public puisse prendre conscience de ‘ce qui se fait a lest et a l’ouest du pays. On ne s’est pas occupé de notre volonté. 2—On a éparpillé autour des esca- liers de l’entrée les oeuvres qui mar- quaient une certaine fraicheur nou- velle. Il est évident que les oeuvres de Cozic. Laberge, Hague et Dean au- raient di occuper lune des grandes salles. 3—On n’a pas voulu expliciter que les oeuvres des membres du jury étaient hors concours et n’avaient done pas été jugées par le jury. Ces oeuvres ne se posent pas comme ayant été preférées a d’autres oeuvres qui auraient été refusées mais elles étaient 1a pour répondre aux régle- ments de l’Académie. Elles auraient da étre présentées en dejors des sal- les d’exposition. 4En dépit des avertissements re- peétés de membres du jury, l’accro- cheur, M. Rosshandler a refusé de présenter l’oeuvre ‘An American Painting’’»telle qu'elle avait été choi- sie par le jury. C’est-a-dire l’oeuvre recouverte de toile de lin écrue et qui, dans l’esprit du jury, devait étre ac- compagnee d’un deuxiéme panneau, li- bellé “Cancelled”. Aux yeux du jury, ces deux oeuvres ne pouvaient étre séparées l’une de l’autre. Le conser- vateur n’avait pas le droit de se sub- stituer ici au jury et il appartenait a artiste seul d’exprimer son point de vue et de retirer son oeuvre's’il le ju- geait a propos. 5—Un accrochage qui se base sur les analogies superficielles de style nous semble tout a fait négatif et tend en réalité a’ ridiculiser les oeuvres. Telle la jonction des oeuvres d’un Tousignant, qui utilise la peinture phosphorescente et des lampes allu- meées, la relation Marion Scott et Hur- tubise ou encore “An American Pain- ting” et oeuvre de Tanabe. (Le som- met du ridicule est peut-étre l’adjonc- tion de deux structures de bois pour indiquer le titre d’une sculpture rem- bourrée, dont’ l’aspect tactile est ex- trémement important et qui se déefinit par rapport a ses relations au plan- cher). On comprend encore moins bien l'introduction d’une oeuvre concep- tuelle, telle le “‘Cancelled’” dans une salle qui groupe des oeuvres s’insé- rant dans une certaine continuité plas- tique, le tout encadre du “Good Bye” de Tom Dean. C’est la encadrer un certain nombre d’objets plastiques dans une structure linguistique péjora- tive, sinon nettement injurieuse. Normand Thériault aed iphoto Antoine Désilets, LA PRESSE