page 6 L’APPEL Mars 1967 gue francaise jusqu’en 1898; que le premier archevéque de New Westminster fut Mgr J.L. D’Herbomez, 0.m.i., suivi de Mgr Durieu et de Mgr Dontenwill, de la méme congrégation. Ce dernier fut le premier archevéque de Vancou- ver, alors que le siége de New Westminster cessa d’exister 4 partir de 1908. Mgr Donten- wilt fut élevé au rang de supérieur général des oblats, 4 Rome, en 1910. Depuis ce temps, les archevéques de Vancouver sont de langue anglaise. (Le lecteur intéressé pourrait retrou- ver des moments palpitants de V’histoire de PE- glise en Colombie en lisant la “Vie de Monsei- eneur Seghers” par Maurice de Baets; “The Bell and the River” (Pacific Books Pub., Palo Alto, Calif. U.S.A.) ; Au Berceau de la Colom- bie Britannique, d’Olivier Moreault; ainsi que les livres du R.P. A.G. Morice, O.M.I.) Nous commettrions une faute grave si nous ne mentionnions pas les Soeurs de Sainte-An- ne, emmenées par Mer Demers, de Lachine, en 1858. Nombreuses sont les institutions d’ensei- enement fondées par elles. C’est sur le dévoue- ment sans borne, le courage a toute épreuve et le désintéressement total de ces petites qué- bécoises, et sur leurs cendres, que repose au- jour@hui Védifice majeur de lenseignement primaire et secondaire catholique en Colombie. D’autres communautés d’enseignantes sont ve- nues plus tard. Parmi celles qui tiennent en- core allumé le flambeau de l’espoir pour l’en- seignement catholique en langue frangaise, mentionnons les Ursulines de Rimouski et les Soeurs du Bon Pasteur, de Québec. ' Maintenant, levons le rideau sur la scéne historique. Nous avons vu, au chapitre précé- dent, que le nombre de colons canadiens-fran- cais augmenta sans cesse durant l’épopée des voyageurs et des traiteurs de la Compagnie du Nord Ouest, fusionnée, dans les années 1820, avec la Compagnie de la Baie d’Hudson. Une anecdote racontée dans une Histoire de la Co- lombie Britannique, par Walter N. Sage, il- lustre la proportion de Canadiens Frangais parmi la population blanche des Territoires de l’Orégon, lors de V’établissement d’un gou- vernement provisioire sur la riviére Willa- mette. “Le 2 mai 1842, les colons, sur la Willa- mette, se réunirent 4 Chemseg et votérent en faveur de la formation d’un gouvernement provisoire en attendant que les Etats Unis ne ‘prennent possession des Territoires de l’Oré- gon. D’aprés la tradition, il y eut presqu’éga- lité: les américains votant pour le gouverne- ment et tous les Canadiens frangais, moins deux, votant contre. Ces deux Canadiens fran- eais, dont l’un avait participé a la rébellion de Papineau et avait fui le Bas-Canada en consé- quence, se mirent du cédté des américains et fi- rent pencher la balance du cété du Stars and Stripes.” Le Dr McLoughhn, alors facteur de la Com- pagnie de la Baie d’Hudson, natif de Riviére du Loup, suggéra, dés 1832, de faire venir des prétres pour les nombreux catholiques, sur- tout canadiens francais; qui n’avaient aucun secours religieux. La compagnie accepta et insista pour que ces prétres arrivent au plus tot, défrayant elle-méme le transport, la nour- riture et autres avantages jusqu’a ce que des missions puissent étre établies. C’est ainsi qu’arrivérent les premiers pré- tres mentionnés plus haut. Leurs premiers de- voirs consistérent 4 régulariser état matrimo- nial d’un grand nombre de colons et a bapti- ser plusieurs douzaines d’enfants.. Ce qui pourrait peut-étre le mieux expliquer l’harmo- nie relative qui régnait entre blanes et indigé- nes, du cdté canadien, pendant que le sang coulait aux Etats Unis, ¢’est l’alliance natu- relle qui s’engagea entre les voyageurs et les Indiens du Pacifique. Le voyageur ne semble pas avoir eu de préjugés raciaux. L’histoire des Métis n’est-elle pas, aussi, la preuve docu- mentaire de cette fraternité qui, par extension, prévint qu’un sort impitoyable ne fut aussi le lot des Amérindiens du Canada? Dans cette mention des voyageurs, il ne faut pas oublier son compagnon écossais. Lui non plus ne souf- frait pas du complexe racial. Lui, comme le Canadien franeais, était rude, aventurier, mais humain. Les hyménées, si libertines et illégi- times qu’elles furent, se consolidérent, généra- lement, par des alliances durables, dignes de la tradition la plus chrétienne. Les missionnaires doivent avoir leur part @hommage. Eux ne voyaient que l’Ame des sujets qui leur étaient confiés. Ils avaient laissé derriére eux la civilisation et son hypo- erisie. Le contact avec la nature est la meil- leure école de Vhumanisme pratique. Au milieu de la forét les hommes sont égaux. L’ennemi est de taille; il n’y a done plus de temps pour en eréer artificiellement. C’était le cadre idéal pour semer le christianisme. Mais le régne du Christ semble impossible sans l’établissement temporel de l’Eglise. La moisson était riche parmi les peuplades indien- nes et la population blanche augmentait ra- pidement. Pendant que la population franco- phone s’assimilait graduellement 4 l’anglopho- ne qui grossissait 4 la faveur d’une forte im- migration britannique, l’Eglise fit de méme. En rétrospective il faut dire que l’Eglise avait aucune mission de respecter l’origine culturelle des colons qui avaient motivé sa présence en Colombie initialement. Le titre de colonie britannique ne fut assuré 4 la Colom- bie qu’en 1846. En 1856, il n’y avait pas encore de gouvernement responsable. De plus, la plu- part des missionnaires, bien que francophones, venaient d’Europe et pouvaient facilement présumer de l’unilinguisme anglais de ce terri- toire; qu'il soit américain ou britannique. Toutefois, il est important, aujourd’hui, en marge du dialogue qui se déroule au Canada, de rappeler ces faits historiques qui établis- sent la tradition des deux peuples fondateurs dun océan a l’autre. Les liens d’est en ouest qui ont donné une identité commune 4 ce pays ont été jalonnés, bon gré mal gré, par les deux. Soustraire l’un ou l’autre, rétroacti- vement, au role qu’il a joué, remettrait tout en question, de l’Atlantique au Pacifique, avec la seule exception, peut-étre, de Terreneuve. (A suivre)