V lieux populaires et d'une partie de la classe moyenne, le bilan de I'AN I du gouverne- nement Bourassa parait désespé- rant et le premier ministre pré- sente une image pour le moins inconsistante. L’assurance-maladie procure le seul motif evident de satisfaction. Bien que la paternité en soit attribuée au gou- vernement précédent, celui de M. Jean-Jacques Bertrand, on loue M. Claude Castonguay de l’avoir mis en application. Par ailleurs, on se félicite de sa “vision globale en matiere de sécurité sociale et de ses efforts pour récupérer tous les pouvoirs dans ce secteur en vue d’établir une politique coherente”’. C’est ce qui ressort d’une enquéte menée a Montréal: aupres de porte-pa- role des grandes centrales syndicales, la Confédération des syndicats natio- naux (CSN) et la Fédération des tra- vailleurs du Québec (FTQ), de la Jeu- nesse ouvriére catholique (JOC), d’or- ganisations comme la Maison du ch0- meur et le Comité d’action politique (CAP) de Saint-Jacques, ainsi que de la société Saint-Jean-Baptiste. Prié, comme tous nos autres interlo- cuteurs, de refléter lopinion de son milieu a légard du gouvernement Bourassa, le président de la CSN, M. Marcel Pepin, a répondu: “Ce gouvernement demeure quelque chose qui est en dehors des travailleurs dans lequel ils ne sont pas impliques, et qui est par conséquent incapable de soulever leur enthousiasme pour des taches communes.”’ Ce point de vue rejoint, pour l’es- sentiel, tous les autres témoignages. Sauf pour ce qui est de l’assurance- maladie et de la politique sociale de M. Claude Castonguay, on a partout du mal a trouver des motifs de satis- faction dans l’action du gouvernement. En revanche, les motifs de méconten- tement pullulent et sont, pour la plu- part, facilement identifiables, le ‘prin- cipal étant la stagnation économique et la croissance du chémage. Le portrait de Bourassa Avant d’aborder ce bilan, examinons le portrait .qu’on brosse de M. Bou- rassa. Coté physique, on n’y releve aucun trait attachant, comme en offrent Tru- deau ou Lévesque, par exemple. Chez les jeunes, pour qui il est avant tout “Je gendre a Simard’, on s’amuse a le baptiser ‘‘le cou fin” ou “le bien peigné”. Rien chez lui, meme son style, ne les fascine. Sur le plan politique, le chef du gouvernement passe généralement pour un homme faible, ballotté entre les intéréts du Québec et ceux d’Ot- tawa. Il est prisonnier des milieux fi- nanciers qui l’ont soutenu dans la course a la direction du parti libéral et pendant la campagne électorale, souligne M. Francois-Albert Angers, président général de la SSJBM. Selon M. Fernand Daoust, secrétaire général de la FTQ, l’évolution person- nelle de M. Bourassa semble se preci- ser depuis quelques mois, surtout de- puis les événements d’octobre, et tout indique qu’il a opté pour une politique qui s’oriente nettement a droite. Evoquant le passé, M. Daoust note que M. Bourassa “montrait une grande disponibilité a Végard des idées qui s’affrontaient dans la société québecoise. Apres avoir flirté avec le Mouvement _ souveraineté-association, son enracinement dans le milieu fi- nancier des Simard et V’influence de Jean Lesage l’ont conduit a la direc- tion du PLQ. Un faible On estime que la faiblesse de carac- tere de M. Bourassa se répercute im- manquablement sur son équipe. Le plus. bel exemple, a cet égard, “est son comportement devant Ottawa lors de la crise des enlévements’’. On cite également sa tentative d’instaurer le francais 4 V’usine GM, a Sainte-Thé- rése, et ‘la déclaration hostile au na- tionalisme économique canadien” qu'il a faite au cours de sa récente rencon- tre avec des financiers américains. Le style du gouvernement Bourassa, précise-t-il, n’est pas facile a décrire. I] ne s'iimpose pas d’emblfe comme celui de Lesage ou de Jchrson. Ce gouvernement en esi un d’umbres chi- nuises: sa demarche, ses politiques, son idéologie ne sont pas clairement indiquées. Il faut deviner ses inten- EL SE esi nevis ser brutalement a Vimagination popu: + laire, conclut-on. Les 100,000 emplois Revenons au bilan. L’affaire des 100,000 emplois expli- que dans une large mesure le profond manque de confiance que l’on éprouve a l'egard du gouvernement et de son chef. *‘Douze mois ont passé, et c’est pire que jamais’’, crie-t-on sur tous les toits. Aujourd’hui, on ne doute pas que les ‘‘100,000 jobs” n’étaient qu’un pur slogan électoral, c’est-a-dire une fausse promesse. La réaction com- mune est celle-ci: ‘On ne nous re- prendra pas de sitot, car on ne croit plus en lui’. : Chez Jes travailleurs syndiqués, par- ticulierement, cette affaire prouve une fois de plus qu’aucun gouvernement ne peut prendre, en regime capita- liste, les moyens qu’il faut pour assu- rer a tous l’exercice du droit au tra- vail. Peu de gens attachent de l’im- portance aux efforts du premier mi- nistre en vue d’attirer des investisse- ments pour combattre le chomage. “Avec ce systeme, seule une catastro- phe comme la guerre permet le plein emploi”’, disent certains. Le désabusement a gagné les tout jeunes d’une facgon effarante. ‘‘Nos gars et nos filles les plus éveillés en arrivent a la conviction que le cho- mage est une stratégie du systéme et profite finalement a quelqu’un’’, fait- on observer a la JOC. Ces “gars” et ces “filles” sont au nombre des quelque 80,000 Québecois, agés de 18 4 25 ans et pour la plupart francophones, qui forment environ le tiers de la population frappée par le chomage. Selon la JOC, aucune nouvelle politi- que n’a été mise en oeuvre par le gouvernement Bourassa en faveur de la jeunesse. ‘‘Les jeunes travailleurs ne se sentent ni plus valorisés, ni plus favorisés, ni plus protegés.” Deux exemples Deux des mesures prises par le gou- vernement Bourassa, la majoration du salaire minimum et la réorganisation de la formation professionnelle, sem- blent loin d’avoir donné les résultats attendus. La nouvelle loi du salaire minimum nest pas plus appliquée que l’an- cienne, soutient-on, surtout dans les petites entreprises ol n’existe pas de syndicat. On se plaint ‘‘que les lois, y compris celle-la, ne se rendent pas jusqu’aux citoyens”. En d’autres ter- mes, Jes intéressés ne disposent pas . des informations et ne connaissent pas les mécanismes qui les améneraient a faire valoir leurs droits. Selon Jes co- mités d’action politique, ceux qui ont Vaudace d’invoquer la loi pour obliger les patrons a s’y conformer “‘courent tout bonnement le risque de perdre leur emploi’’. Les dispositions relatives a la for- mation professionnelle — et au recy- clage — ne seraient pas plus effica- ces. La sélection, signale-t-on, releve du gouvernement fédéral, par l’entre- mise des Centres de main-d’oeuvre, et s’effectue dans Vignorance de la situa- tion des régions. Par ailleurs, puisque c'est Ottawa qui paie, Québec n’a pas le pouvoir d’orienter la formation pro- fessionnelle conformément aux besoins et aux aspirations des Québecois. Sentiment d‘abandon Autre grief formule presque par- tout: les structures que le gouverne- ment met sur pied ne parviennent pas a rejoindre “les inventions de la base’, expression qui désigne les nou- velles: formes d’activité économique, a caractére de coopération et d’autoges- tion, créées par les travailleurs et les chdémeurs. Résultat: la jeunesse laborieuse, in- capable de satisfaire sa soif de parti- cipation, se croit rejetée par un gou- yernement qu’elle accuse de privilé- gier les étudiants, notamment par sa politique de loisirs et de sports. “On ne nous reconnait pas comme l'une des jeunesses”’, affirme-t-on. Ce sentiment d’abandon est presque aussi vif chez les adultes sans travail qui ont décidé de ‘se sortir du trou” en lancant des ateliers, des magasins, des cliniques: communautaires. La, comme a Ja Maison du chomeur, sym- bole par excellence d’une des révoltes contre le systeme économique en du gouvernement, mais a condition} qu’elle laisse pleine liberté d’action aux bénéficiaires. 5 L‘indépendance Dans tous les milieux ot s’est de roulée l’enquéte, on ne s’est pas géné pour“ accabler le gouvernement Bou- rassa de bien d’autres péchés, au pre- mier rang desquels figurait son “‘in- faction dans le domaine dy logement lsalubre a loyer modéré”’, rm is le con- flit constitutionnel, la question du francais4angue-de-travail” et la pers- pective de l’indépendance du Québec venaient en second lieu dans les cou- ches défavorisées. “Tout cela deviendrait des préoccu- pations majeures pour les économi- quement faibles s’ils n’avaient, dans limmédiat, un probléme plus majeur encore, celui de survivre”’, indiquait- on, en ajoutant: ‘‘Ne vous y trompez pas: ces gens voient leur indépen- dance dans une libération économique qui ne saurait se produire, a leur avis, avec le gouvernement Bourassa. Ils veulent tellement que ¢a change que beaucoup d’entre eux ont voté PQ aux derniéres élections, C’était leur seul espoir.”’ Dans les couches moins deéfavori- sées, on se meéfie du gouvernement Bourassa sur le plan constituvionnel. On va jusqu’a craindre une collabora- tion inconditionnelle du Québec avec le gouvernement Trudeau. En ce qui touche le frangais-langue- de-travail, on apprécie diversement la politique de M. Bourassa. Certains pretent de bonnes intentions au pre- micr ministre, mais ils constatent quil a obtenu jusqu’ici de maigres ré- sultats. On souhaite qu’il fasse preuve de plus de fermeté, car on associe la prépondérance de l’anglais — méme aux échelons élevés de l’entreprise — a Ja domination du Québec par l’é tranger. Le mot de Ia fin Au total, le jugement porte par les milieux populaires est done tres som- bre, pour ne pas dire noir. Est-ce parce que les politiques du gouverne- ment Bourassa sont mal diffusees? Est-ce parce qu’elles sont sans eclat? Quoi qu'il en soit, laissons le mot de la fin a nos interlocuteurs: — Un peuple ne peut vivre que de securité -sociale, et encore moins un gouvernement. Pierre SAINT-GERMAIN DISQUES AUX PRIX DE GROS DISQUE GRATUIT LORSQUE VOUS DEVENEZ MEMBRE Revue périodique gratuite listant des centaines de disques vous faisant réaliser des épargnes allant jusqu’a 60%! Les étiquettes Pathé, Barclay, Phillips, Apex, Columbia, etc. Un choix illimité! Les microsillons de Ginette Reno, Mireille Mathieu, En. Macias, Renée Claude, des centaines d'autres de toutes catégories! Aucune obligation d’acheter un certain nombre de disques! GARANTI! Si vous n’étes pas absolument satisfait, vous pouvez retourner le matériel du Club dans les 10 jours Suivant la réception pour remboursement de votre cotisation! Retournez cette annonce avec votre cotisation de $2.50 ou tout simplement la retourner pour de plus amples informations. @ LE CLUB DU DISQUE FRANGAIS P.O. 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