LE PREMIER PROFESSEUR FRANCOPHONE Le Pére Lempfrit obtient finalement un logis dont il se sert pour les services religieux et les classes d’école. II le décrit ainsi dans sa lettre du 14 septembre: “J'ai commencé mon école, on m’a donné une espéce de taudis ou je loge et ou jai érigé un autel..." Dans sa longue lettre adressée aux Révérendes Soeurs Grises de Montréal, le 9 février 1850, il écrit: "J obtins un logement ou je pus monter une chapelle plus décente et établir ma petite école. Car en arrivant ici Je trouvai les pauvres enfants de nos Canadiens dans la plus crasse ignorance, ne sachant pas méme faire le signe de la croix. Jannoncai que jallais me charger de leur instruction sans toutefois négliger mes pauvres Sauvages. Dés le principe, jen eus 20 @ 25. Depuis ce temps, le nombre a diminué parce que plusieurs d’entre eux sont partis pour d'autres forts.” Ce dernier commentaire indique que la majorité des éléves du Pére Lempfrit était probablement des Indiens. Le curriculum des matiéres enseignées ne semblait pas étre défini clairement en raison des transferts fréquents des engagés tel que mentionné aux Soeurs Grises, 4 Pindifférence des Indiens face 4 la discipline horaire et, finalement, 4 sa propre situation quant aux nombreux changements de “salle de classe”. Il enseignait le chant religieux en francais et en latin. Dans sa lettre aux Soeurs Grises, il écrit: "Ces bonnes gens ne comprennent pas le latin, hé bien, ils ont un plaisir incroyable a chanter le Kyric, le Credo, mais surtout les litanies de la Sainte Vierge. ...V ous ne sauriez croire, ma Révérende Mére, combien les traits historiques de l’Ecriture Sainte les touchent et les intéressent. Ils ne perdent pas un mot. Les petits enfants ne bougent pas. Jen ai vu pleurer au récit du massacre des Saint- Innocents, a la conservation de Moyse au milieu des eaux.” Dans sa lettre du ler novembre 1849 il écrit: “Nous n’avons pas de noisetiers dans toute I’Ile, je voudrais pouvoir faire des balais comme ceux du bon Pére Jaiol. Veuillez bien le prier de me couper une douzaine de beaux morceaux dont je ferai des balais avec mes sauvages... Parmi mes éléves, fen ai six qui sont en état de recevoir des lecons d’écriture et d’arithmétique”. En finissant il demande: “Jai remarqué un jour que vous aviez beaucoup de petites ardoises pour apprendre a écrire. V oudriez- vous bien m’en envoyer quelques- unes ainsi que des crayons a ardoises...” 10 PROJET AVORTE Malheureusement pour le Pére Lempfrit, ses projets concernant sa petite école ne prirent jamais Yenvergure désirée. Bien que le Gouverneur en avait commandé la construction, les travaux durent s’arréter quand les ouvriers furent employés 4 des travaux plus prioritaires. De Juin 1849 a Juillet 1862, le Pére Lempfrit se Tetrouva seul sur I’Ile 4 s’occuper du soin des ames, Mgr Modeste Demers s’étant rendu en Europe pour le recrutement de missionnaires et la recherche de fonds. CONCLUSION Les activités du Pére Lempfrit n’ont pas été reconnues a4 leur juste valeur. Les raisons en sont multiples: attitude intransigeante du gouverneur envers les projets scolaires du missionnaire, interférences politiques et teligieuses de ses supérieurs hiérarchiques, manque de financement de la Propagation de la Foi, comportement des Canadiens-frangais et des Indiens, pour ne mentionner que celles-ci. Pourtant, la lecture de sa correspondance ‘démontre son dévouement complet 4 l’Eglise et au bien de tous par la formation religieuse et culturelle. Quelles que puissent @tre les opinions quant au court séjour du Pére Lempfrit dans l’ile de Vancouver, les traces de son passage sont restées visibles. REFERENCES Nous remercions le Révérend Pére Romuald Boucher O.M.IL, conservateur des Archives Deschatelets d’avoir permis la reproduction de la correspondance du Pére Lempfrit. REFERENCES DES LETT RES CONSULTEES: 13 Juillet 1849 HPK 5322 R48Z 80 13 aolit 1849 APK 5322 R48Z 81 14 sept. 1849 HPK 5322 R48Z 82 Ex.1 ler nov. 1849 HPK 5322 R48Z 83 9 fevrier 1850 HPK 5661 B86C 2 Le Chronographe Volume III no.3 Automne 1986