5, Le Soleil de Vancouver, 12 juin 1970 Vancouver revendique le premier poste d essence Par Albert Martin, reproduit de La Revue Imperial Oil,avril 70 En 63 années 4 peine, 1’époque ott il n’existait nistation ni service, la station—service est devenue presque aussi com— plexe que la voiture méme,. Que nous voyions en elle un besoin - OU une calamité, il est un point que nous oublions d’ordinaire: entre 1907 et 1970, comme l’au— tomobile, ellea fidélement reflé— t@é au Canada un Gertain mode de vie, nos états d*’ames et notre economie, depuis DEFENSE DE FUMER |! Ainsi naquit la premiere station—ser— vice en bonne et due forme au Canada, Bien des gens furent loin de s’en réjouir, Les personnes sans auto, notamment les cultivateurs, détestaient tout ce qui avait trait aux bruyantes yoitures sans che— vaux, Ces bolides ne filaient—ils pas 4 10 et meme a 15 milles 4 l*heure, semant la panique chez les poules, femmes, vaches et pas de nettoyage de pare—brise (des voitures n’en avaient meme pas). La premiere pompe a essen— ce, actionnée par piston, a été fabriquée vers 1910 par la com— pagnie Gilbarco (important fa— bricant de pompes encore a I*heure actuelle), Mais tout con— ducteur avise n’etait jamais sans son entonnoir et son filtre de chamois, car on ne garantissait pas la pureté du carburant. Il res rapides les jeunes filles dans le vent, cheveux courts—bouclés, & la jupe courte et au bas de couleur chair, et quiparfois me— me grillaient la cigarette! D’au— tres citoyens, dont le visage é— tait placardé au bureau de poste avec la mention RECHERCHE, bénissaient la voiture qui trans— portait en trombe l’alcool de contrebande 4 la frontitre a— méricaine, La station-service reflétait la La premiere station-service au Canada—boyau de jardin et réservotr a eau domestique sous abri—s est établie & Vancouver en 1907 Tout a commencé en 1907, le jour owt les chevaux ont pris le mors aux dents a l’entrepdt de Vancouver de l*Imperial Oil, au coin des rues Sithe et Cambie, les bétes calmées, les ~ Sirens des livreurs étouffés et les barils de kéroséne remis en ordre, le contremaitre s’ex— clama, devant tout ce gachis ‘Fermez bien la barriere, et qu’on ne laisse jamais plus en— _trer de ces inventions sa— taniques!?? Le monstre était une chevaux? Des cultivateurs dis— poserent des pieges dans les chemins et les législateurs dres— seérent des obstacles légaux, Ain— si, dans la plupart des provinces, ‘Vautomobiliste devait s’arréter sur demande, 4 l’approche d’une voiture a chevaux, et la guider en lieu str jusqu’au—dela de l’auto, Et on ne faisait pas faute de l’exiger. Meme les compagnies pétro— lieres faisaient la moue, L?es— sence était pour elles un sous— Pendant la premiere Grande Guerre, ce personnel au frais minois débitait Pessence a Vancouver voiture sans chevaux qui, hale— tante, s*était arr@tée pour pren— dre ‘de l’essence, directement a l’entrepot, comme le faisaient alors la plupart des automobi— listes de Vancouver, Ailleurs au Canada, on achetait surtout l’es— sence en bidons 3 la quincaillerie. Il n’y avait pas de véritable station—service pour les quel— que 4,000 voitures du pays. Comme les automobilistes de Vancouver ne pouvaient plus ve~ nir 4 l’entrepot, on leur apporta l’essence A la rue dans des sceaux:, L’lmperial Oil dut baisser pavillon et installer jus— qu’a la chaussée une conduite d’un demi—pouce avec soupape. Quel luxe |! Les automobilistes affluerentdavantage et on affecta un employé a les servir. Il se lassa bientOt de peiner sous les intempéries de Vancouver, et l*Imperial Oi] lui batit un abri ouvert A l’avant, Le directeur local, M’C.M.Rolston, monta en— fin un réservoir de cuisine de 13 gallons pourvu d’un boyau de jardin et d*une affiche voyante: produit peu important du brut, utilisé surtout pour nettoyer les gants des femmes, Le combus— tible important, c*était le kero— séne, L*avenir de l’essence et des stations—service paraissait précaire; tout homme sensé au— rait juré que l’auto ne détrone— rait jamais le cheval. Bien au contraire, l’automobile a frayé son. chemin dans nos coeurs, actionnée d’ordinaire 4 l’essence os dépit de la vogue éphémére des voitures électri— ques et & la vapeur), Les sta— tions—service se multipliérent 4 travers le pays,Le plein se fai— sait de fagon primitive; le con— ducteur deplagait la banquette avant pour donner accés au ré— servoir, (Il se tourmentait peu de rouler ainsi sur un volcan, déja assez tracassé par les clous de fers, la rupture des chaines de commande et des essieux, les ‘fondriéresincroyables, et les’ in— sultes et pierresdes garconnets), On yersait l’essence au boyau ou a l*arrosoir, Et c*était tout: pas de verification @’huile (les trous et godets graisseurs), était sage aussi de garder un bidon d’essence dans la voiture puisque les stations étaient fort distantes, Pas de service deré— paration des pneus! Pour toute réparation, on portait la voiture au forgeron ou au marchand de bicyclettes. Et pas de salle de toilette! La mére voyait A ce que les petits prennent leurs pr écautions avant le départ, Les stations étaient | fort di— verses, des simples pompes & l’extérieur d’un magasin jusqu’a des constructions diverses, de la maison proprette de brique au toit incliné jusqu’a la cabane de planches sans peinture. Hom— mes ou femmes faisaient leser— vice, vétus d*’un uniforme ou bien d*une salopette graisseuse, La pénurie de main—d’oeuvre pendant la premiére Grande guerre, porta lImperial Oil A affecter des femmes aux sta— tions; jolies,variantes fémini— nes du Baron Rouge tant honni elles portaient jambiéres, pan— talon aux genoux et veste de type militaire, Pendant toute cette période du début, la station de 1’Imperial Oil fut la seule dans bien des petites villes mais, dés les années 1920, tout avait déja bien changésmarques et stations mul— tiples, 509,0°0 véhicules au Ca— nada et, dans plusieurs provin— ces, premiere taxe sur l’essen— ce. Le pays avait accepté d’em— blée l’automobile devenue plus rapide, plus fiable, et désormais couverte, Les randonnées de— venaient moins une épreuve, Les cultivateurs trouvaient 4 l’auto de bons cotés , elle portait oeufs et beurre au tharché en cing fois moins de temps que le cheval, Les jeunes hommes _ aimaient impressionnner par leurs voitu— En 1911, c'est le personnel de V entrepéot que vendait essence a Regina liberté de 1’époque et exprimait le style baroque des années 1920, riche en tours, pignons, tuiles de toiture et fenétres coquettes. L’automobiliste aimait de plus en plus voir l’essence; aussi la maison Gilbarco concut—elle en 1925 la premiere pompe trans— parente, imposante structure chapeautée d*un globe illuminé ot on inscrivait la marque ou simplement ESSENCE, Sous le globe, un cylindre gradué de verre de cinq ou de dix gallons laissait voir le carburant. Ces vieilles pompes élancées furent l’un des symboles des années 1930. posé faisait le plein et l’essence ‘passait au réservoir en déga— igeant une bonne odeur prenante ‘qui complétait 4 merveille cel— ile de Ihuile et de la graisse, Il permettait parfois ensuite a un jeune de remplir la “ pom— pe’? comme on appelait leréser— voir de verre,, Au va—et—vient d’une manette, l’essence surgis— sait d’une citerne enfouie et com— blait le cylindre gradué pour le plein suivant, Néanmoins, les voitures et les stations ont eu la vie dure pen— dant la crise et pendant la|deux— ieme Grande Guerre, époque de rationnement de l’essence, Elles connurent leurs jours fastes au retour des soldats, 4 la reprise de 1’économie et a la montée—é— clair des puits de pétrole dans l’7Ouest Canadien, Le Canada se remit gaiement au volant— le nombre des véhicules passa de 1,497,009 en 1945 a 5,256,000 en 1960. Et la _ prolifération des stations—service fut, pour un temps sans effet défavora— ble. A Vapproche de 1960, 1’éco— nomie se resserra, la concur— rence devint forcenée sur le marché, les guerres de prix é— clatérent, les critiques foison— nérent dans le public et la pres— se , et les enquétes gouverne— mentales se succédérent. Et tout cela, pendant une évolution rapide, presque violente, de la société. La population plus nomade devint plus consciente du service et de la valeur que jamais et, comme toute la socié— té nord—américaine, l’automo— biliste prit un rythme trépidant, Dans ce climat, les stations— service furent souvent prises a partie comme trop nombreuses trop laides, trop peu serviables, Ces accusations n’étaient pas toutee méritées, Ainsi, vers 1965, le nombre des débouchés de détail au Canada, du motel ou de l’atelier de réparation doté d’une pompe 4 essence jusqu’a la station proprement dite(air gratuit, salles de toilette, fosses de graissage,.. accessoires de voitures ), avait augmenté d’en— viron 30 pour cent en 25 ans contre 75 pour cent pour la po— pulation, 323 pour cent pour le nombre des immatriculations et 492 pour cent pour les ventes d’essence, Mais les stations étaient de fait groupées de fa— gon peu rentable dans certaines villes et il en existait de laides et d’inefficaces, La station— service se devait d’évoluer a— vec la société nouvelle, L’Imperial Oil fut a la pointe Station du magasin Rousseau a Sweetsburg, dans les Cantons del’ Est, en 1919 La station de petite ville flan— quée d’un garage, simple comme elle. Rendez—vous des hommes et garcons, elle mariait les plaisirs gratuits aux affaires sans hate. Les jeunes appuyés aux pompes apprenaient a cracher ou €coutaient les adultes dis— cuter du premier ministre R.B, Bennett, de la crise, des fem— mes, des récoltes et du prix des bovins, A l’approche d’une voi— ture, un connaisseur qui recon— naissait toute marque & sa sil— houette marmonnait ** un Chev 31”? ou ** un Ford 24%, d’un ton détaché qui exprimait néanmoins un respect souverain ou un to— tal mépris. AT’arrét de la voiture, les jeu— nes badauds demeuraient acco— tés ou accroupis, sans ~ autre . Mouvement que le machonnement rythmé des cure—dents ou du tabac, et ils scrutaient d’un oeil critique le véhicule, aux enjoliveurs,: jusqu’ ce que le conducteur exaspéré en sorte et sonde du pied ses pneus, pour la galerie, Entte temps, le pré— du capot ~ de cette révolution de la mise en marché, Elle a implanté la premiere clinique de voitu— res au Canada: on y obtient a prix modique le diagnostic élec— tronique du véhicule, Par le pre— mier programme d*agencement du marché au monde (l’analyse minutieuse des marchés de l¥es— sence’ dans une ville,) elle a éliminé les stations peu renta— bles et établi & l’endroit youlu le poste approprié, du simple débit @ la grande station, selon les besoins, Fidéle 4 un mo— déle qui l’identifie, 1’Imperial Oil a varié )*apparence de ses stations; pierre ou bois, aménagement paysagiste, sil— houette harmonisée 4 ]’architec— ture voisine, De simple ** débiteur’? d’es— sence, le détaillant m@me s’est transformé en homme d’affaires consommé dont les mesures de l’Imperial Oil améliorent la car— ritre. Elle a crée des commis— sions consultatives ot les dé— taillants et elle—m@me com— suite page 6, VANCOUVER....