Le retour des fauves Suite Le cougouar se repaft de cerfs. Depuis les derniéres années 1930, ces cervidés abondent en Saskatchewan ; on en estime le nombre a 500,000. Le cerf a toujours hanté la province, mais son abondance relative résulte en partie des programmes de gestion de la faune dans Est du Canada et aux Etats- Unis. Des spécialistes de la faune comme 1’écologiste H.S. Maliepaard ainsi que Lyle Lensen, surintendant du parc provincial de Buf- falo Pound, quelques milles au nord-est de Moose Jaw, confirment les dires de Tom White : lorsque leur terri- toire s’est surpeuplé et que la nourriture s’est raréfiée, ery 2 = — les cerfs ont migré vers le nord et vers l’ouest. Dans son enfance, 4 Vanscoy, prés de Saskatoon, Lensen a ra- rement.vu de cerfs. Aujour- d’hui, cette espéce abonde partout dans le sud et le centre de la province. Les prairies, qui semblent dépourvues d’arbres, sont pourtant entrecoupées de ra- vins et de bois de peupliers qui assurent le couvert et la nourriture au cerf. Vers 1935, la sécheresse et la crise ont fait abandonner bien des fermes et le cerf a pu errer 4 loisir. A la sécheresse succéda la guer- re ; la chasse se fit plus; rare. Enfin, la paix revenue, les grandes fermes méca- nisées, gérées de la ville, se généralisérent. Guére menacés, les cerfs se multipliérent. Le cou- | gouar fut alors attiré par leur abondance, en méme | temps que le lynx et le chat Sauvage, qui s’intéressent | toutefois davantage au lié- vre, également fort floris- sant dans la province. Tom White explique cette | Ped dernier 667 oiselets, estime abondance du gibier par 1’ axiome ; ‘‘La nature a hor- reur du vide.’? Et il pré- cise. : ‘*A mesure que la présence humaine diminue, l’animal prend la reléve.’? ' Ainsi en juge aussi Douglas les mieux connus de la Sas- katchewan, sans toutefois étayer de faits l’hypothése : ‘*Cela me semble tout sim- plement naturel.’’ Leith Knight, auteur d’un volume sur les oiseaux du centre de la Saskatchewan, se montre plus précis. Sa femme et lui exploitent 4 compter de la ville une fer- me .située A 35 milles envi-_ ron au nord-ouest de Moose Jaw, 4 Rowletta. Au témoi- gnage de Mme Knight, on trouve souvent des cerfs sur la terre, le pluvier criard niche sur la pelouse d’avant et les gaufres tiennent con- ' grés dans la cour de la fer- me. L’abondance des gaufres , attire 1’épervier et le hibou des marais. ‘Il en serait bien autrement si nous ha- bitions la ferme,’’ assure Mme Knight : ‘‘1Latondeuse éloignerait le pluvier, les chiens repousseraient les gaufres, et le cerf aurait peur de nous.”’ Le Dr Stuart Houston, de Saskatoon, expert en oiseaux de proie qui a bagué l’an que la théorie du vide chére a White n’est qu’un facteur entre bien d’autres du grand nombre de bétes. Il men- tionne aussi l’abondance de la nourriture et l’absence de Parasiticides. I] ajoute tou- tefois ; ‘*Nous avons vu fré- quemment des grands-ducs nicher dans les brise-vents aprés le départ des culti- vateurs. En 1969, nous en avons trouvé deux couples dans des granges et un au- tre dans un grenier ; en 1970, un couple nichait dans une maison abandonnée, bon- dée de céréales.’’ L’agent de conservation Douglas Pegg, du ministére des richesses naturelles de la Saskatchewan, signale 1’ augmentation marquée des bétes qui attaquent les ron- geurs-ratons laveurs, blai- reaux et mouffettes. (Les souris et les campagnols | constituent presque une épi- démie dans des régions du | sud de la province.) Le re- nard roux se multiplie aus- si ; le coyote ferait de mé- me, puisque les deux espé- ces sont ennemies des ron- geurs, mais le coyote a été décimé par les appAatsem- poisonnés. Il arrive que les coyotes et renards volent des volailles, ce qui les fait honnir des cultivateurs. Toutefois, de commenter Lyle Lensen, ‘‘1’appat atteint rarement le renard, trop ru- sé.’’ Selon C. B. Forbes, direc- teur de la faune en Saskat- chewan, et son collégue H.S. Maliepaard, 1’absentéisme ne serait pas le grand fac- OR OMIT CRANE Pat, Mee ONNN teur de recrudescence des bétes. Ils ’attribuent en grande partie 4 la gestion éclairée de la faune. Ainsi, la population d’antilopes s’ est accrue de 27,8 %, et 1 récolte d’oies sauvages n’ jamais été aussi fructueuse depuis dix ans (95,042 oi- seaux), mais ils reconnais- sent avec White l’effet ma- gique de l’abondance de nourriture. Et voilA od le cougouar se met de la par- tie. A SUIVRE par Grace Lane **A Cry of Players’? de William Gibson, jouée par le West Vancouver Theatre Guild est la plus vivante des piéces que j’ai vues cette saison. Lorsqu’il y a de ces rares moments au théatre oi 1’on se sent pris par la méme émotion que lVacteur, on pardonne des longueurs et des impréci- sions. Il y avait plusieurs de ces moments. Le sujet de la. piéce est le jeune Shakespeare, ma- rié A Anne Hathaway, son afmée de huit ans, qui se sentant borné par la domes- ticité, se livre au bracon- nage et 4 courir les filles. Les choses vont mal ; Will et ses copains sont punis par Sir Thomas ; d’abord dans une scéne saisissante, on les voit dans le pilori avec les villageois qui les huent, en leur langant des ordures ; ensuite, Will est fouett€ pour avoir écrit un vers diffamatoire sur Sir Thomas. Inspiré par une ré« pétition de Tamburlaine qu’ il a vue A l’auberse (un des moments de vérité), Will décide de quitter Stratford pour aller tenter sa chance 4 Londres. : Au début, la musique éli- zabéthaine nous met dans "ambiance voulue. Des membres du ‘* Vancouver Recorder Society’’, habil- lés en religieuses sont assis dans la salle avec fifre et tambourin, pour jouer des galliards et des gigues a chaque entr’acte. Le rideau | se léve sur un décor trés simple ; des branches et des caisses qui deviendront soit des murailles sur la place du marché, soit un escalier dans la maison de Will. Les gens qui surgissent sur la scéne sont varies comme la vie elle-méme ; enfants, vieillards, jeunes gens et estropiés aux ha- bits déchirés et pouilleux : ce sont des paysans de Stratford. Parmi les plus crasseux est le jeune Will, chose incroyable ; avec son odorat sensible, Shakes- peare a dQ é6tre fastidieux de sa personne méme dans la pauvreté. C’est dans le mouvement de la foule que Marcus Parry montre son | talent comme metteur en scéne : il y a une fluidité et un élément de surprise qui donnent de bons effets théatraux. Le dialogue est moins bon, par la faute d’abord du dra- maturge qui a trop prolonge la lutte intérieure de Will avec sa conscience et son ambition, et aussi par la faute de quelques-uns des acteurs qui ne parlent pas distinctement. Cela vient un peu du style de jeu employe, qui est décontracté et unpeu | ‘thippie’’. David Peterson, qui tient le rdle du poéte, incarne le style ‘‘Stanislav- sky’’ ; il s’intériorise tota- lement et souvent ne com- munique pas. Une specta-. trice commente.a haute voix; «Tl joue tellement qu’on ne le comprend pas’’.. Anne Silcock, dans le rdle d’Anne Hathaway, a une di- gnité rustique et une matu-: rité qui lui attire la sym-. pathie du public. On est plu- fOt pour elle et contre son mari, espéce de ‘‘Flower- Child’? égoiste, ce qui mon- tre un-défaut dans la mise en scéne de la piéce, car c’est avec le génie étouffé de Shakespeare qu’on devrait sympathiser. : _D’excellentes interpré-| tations A signaler :; John ‘Palone, le pédagoguema- niéré, la petite Susanna, fille de Will, jouée par. Allison Veale, Kathryn Souery, la plantureuse Jenny qui dans sa poursuite nocturne de Will, est prise par le pied dans un piége, et 1’étonnant Gilbert - genre homme pré-} ‘historique, joué par un in- connu. En tout, une soirée qui vous laisse la téte pleine d’ima- ges. VI, LE SOLEIL DE VANCOUVER, 9 AVRIL 1971. SSS