6 We Soleil de Colombie, Vendredi 4 Novembre 1977 Un choix national SECTION 14 (suite du Chap/tre 7) veau-Brunswick, en adop- tant une loi sur les lan- gues officielles qui entre- ra en vigueur cette année, a consacré I’égalité des deux langues officielles au Parlement et dans les tribunaux, dans la fonc- tion publique provinciale et dans son systéme d’é- ducation. _ En outre, la province a concu une gamme de _ programmes destinés a offrir aux mino- rités la possibilité de s‘instruire dans l’une des deux langues offi-: cielles et a promouvoir ‘acquisition de ces deux langues dans la fonction publique et les écoles. L’Ontario et le Manitoba, qui n’ont pas jugé né- cessaire de reconnaitre par une loi I'égalité des deux langues officielles, ont cependant donné a leurs minorités de langue francaise de meilleures possibilités de s‘instruire dans leur lan- gue. Le troisiéme principe é- noncé au début de ce chapitre concerne la con- naissance de |’autre langue officielle: Il est souhaitable que le plus grand nombre possi- ble de Canadiens connais- sent les deux langues of- ficielles du Canada; ils en retireront un enri- chissement personnel qui Profitera aussi a la socié- té tout entiére. Ces Canadiens de I’une et l’au- tre langue officielle pour- ront’ ainsi plus aisément communiquer entre eux, mieux apprécier leurs modes de vie respectifs et faire office de lien natu- rel entre les deux com- munautés linguistiques. L’acceptation de ce prin- cipe implique, aux yeux du gouvernement fédéral, que les provinces consi- dérent de leur devoir d’offrir des cours de langue seconde aux ni- veaux pré-collégial et uni- versitaire pour qu’a la fin de sa scolarité, chaque étudiant canadien ait eu la chance d’acquérir une con- Naissance au moins élé- mentaire de la seconde langue officielle. Le gouvernement fédéral a concu de nombreux pro- grammes pour venir en aide aux provinces et leur permettre d’atteindre l’ob- jectif visé par ce principe. Ces programmes ont. été décrits en détail au cha- pitre 6. Le gouverne- ment disposé 4 étudier avec les _pro- vinces les moyens qui Permettraient de faire des progrés plus rapides dans ce domaine. De I’avis du gouverne- ment, les organismes cul- turels du pays, tant publics que privés, et en tout Premier lieu la Société Radio-Canada, pourraient est Pass Lovaas “Tasers | et de leur culture. jouer un rdle plus impor- tant en. offrant aux jeunes Canadiens de tout le pays de plus grandes possibilités d’apprendre ‘autre langue officielle. Ce faisant, ces organismes, outre l’enseignement de la langue, devraient faire connaitre les diverses réalités des deux communautés linguistiques du pays a l’une et a I’au- tre. Le gouvernement verra, avec ces organismes, quels moyens prendre pour y arriver. \ Enfin, le gouvernement - fédéral estime de son de- voir de faire valoir, au nom de la population franco- phone du Québec et des immigrants de cette pro- vince, la nécessité de disposer des moyens d’ac- quérir, s‘ils le désirent, une connaissance d’usage de la_ langue anglaise. Bien des Canadiens franco- phones du Québec n’em- ploient jamais l'anglais, et ils continueront vraisemblablement a cons- tituer une. fraction im- portante de la population a ne jamais utiliser cette langue. -Par ailleurs, il est notoire que le nombre de _ Canadiens francophones qui parlent anglais est déja_ relati- vement élevé. Il serait toutefois irréaliste de prétendre que _ |’anglais n’est, en Amérique du Nord, qu‘une langue parmi bien d’‘autres. Une géné- ration entiére élevée dans. une telle_ illusion ne pourrait manquer, 4a la longue, de se sentir tra- hie. Par-dela l’acceptation et la mise en oeuvre de ces deux principes généraux, le gouvernement fédéral croit que les gouverne- ments provinciaux vou- dront examiner avec soin le rdle qu’ils peuvent jouer pour faciliter l’application du principe suivant, précé- demment énoncé: Le francais et l’anglais constituent un élément essentiel du patrimoine canadien. En conséquen- ce a) les politiques gou- vernementales, fédérales et provinciales, doivent garantir les conditions du maintien et de |’épanouis- sement de ce patrimoine linguistique; b) la ot il existe des minorités fran- cophones ou anglophones, les instances publiques fédérales et provinciales doivent les inciter et les aider ‘4 préserver leur langue. Selon le gouvernement ‘fédéral, il incombe a cha- que gouvernement provin- cial d’arréter les autres mesures intéressant plus immédiatement les grou- pes minoritaires de leur province, et qui seraient susceptibles d’‘assurer la Promotion de leur langue La Lt ckakdocrriens ~ qu’une WA A Fie er 2 situation de |’Ontario et du Nouveau-Brunswick est fort différente de celle des autres provinces anglo- phones. En effet, 97, 8 0/0 des francophones sont concentrés au Qué- bec et dans ces deux pro- vinces. De méme, le cas du Québec est unique en ce qu’un important groupe minoritaire de langue officielle. a, tra- ditionnellement, détenu une position de _ force, en particulier dans I’acti- vité économique de la Province. Il ne semble pas con- venable ni souhaitable tou- tefois, qu’en plus de ces Principes, on propose des regles strictes. Avant tout, doit primer le respect et la civilité a I'égard de la langue officielle minoritaire et des groupes minoritaires de langue officielle de cha- que province. On devrait plutédt prendre des mesures, adaptées aux con- ditions particuliéres de chaque province, permet- tant a ces groupes de prendre part le plus pos- sible 4 la vie de la pro- vince et du Canada, dans leur propre langue offi- cielle. . Au cours des discussions qu’il a eues avec les pro- vinces, de 1968 a 1971 au sujet de la constitu- tion, le gouvernement fé- déral a redit avec insis- tance |’urgence d’adopter et d’incorporer a notre constitution des disposi- tions prévoyant des droits linguistiques . fondamen- taux et qui seraient re- connus et appliqués dans toutes les provinces. A la conférence de Victoria en 1971, certaines de ces dispositions avaient été acceptées par sept des dix provinces et cette acceptation les liait de fagon irrévocable. Tou- tes s’entendirent sur une clause stipulant que, lors- province décla- rerait que les disposi- tions s’appliquent a. son cas, celles-ci seraient “’in- tangibles’’, autrement dit, les droits ainsi concédés ne pourraient étre retirés ni réduits qu’a I’issue de la procédure acceptée pour la modification de notre constitution entiére. Les droits reconnus 4a Victoria étaient notamment les sui- vants: - le droit des gens a uti- liser l'anglais et le fran- Gais dans les débats d’un parlement provincial; - \'impression et la publi- Cation des statuts de cha- que province dans les deux langues; - le droit des gens a té- tee y doe eo cers PRR als 1 moigner devant tout tri- bunal dans I’une ou I’au- tre langue, soit direc- tement, quand les cir- ~ constances le permettent, soit par l’entremise d’un interpréte; le droit des gens a rece- voir des mandats de com- parution et des documents des tribunaux libellés dans les deux langues; - le droit des gens a4 em- ployer la langue officielle de leur choix dans les communications avec |’ad- ministration centrale de chaque ministére ou le bureau principal de cha- que organisme du gouver- nement. L’objectif était alors, modestement, de garantir des droits fondamentaux dont l’exercice serait fa- vorisé dans les provinces parties a l’accord. pour commencer et, _finale- ment, dans tout le Cana- da. On souhaitait aussi qu’avec le temps, d’au- tres droits seraient con- sentis par les provinces en faveur de leurs mino- rités. Une disposition de la Charte de Victoria définissait clairement les Pouvoirs des parlements Provinciaux et du _ parle- ment du Canada, dans les limites de leurs compé- tences législatives respecti- vés, en vue d’étendre I’u- sage de l'anglais et du francais. Le gouvernement fédéral estime que les droits fonda- mentaux proposés dans la Charte de Victoria étaient un bon début et qu’ils de- meurent toujours une base sur laquelle batir pour l’ave- nir. Les provinces offriront justice et sécurité a leurs habitants et leurs descen- dants, dans la mesure ou elles accepteront de donner une base constitutionnelle sire aux droits linguistiques essentiels des minorités de langue officielle de leur ter- ritoire. Elles affermiront en outre la canadienne, selon l‘esprit qui a présidé a sa fonda- tion, et se porteront garan- fédération tes, a l'avenir, de la juste reconnaissance des droits de nos deux communautés lin- guistiques. Le gouvernement souhaite avoir réussi a exposer, dans le présent document, l’im- Portance vitale des deux lan- gues officielles pour le Cana- da. Dans tout pays, la lan- gue est un instrument es- sentiel a la vie en société, car elle est un des moyens par lesquels une société se forme et s’organise. Elle structure les lois, |’admi nistration, |’éducation , les relations d’affaires, les trans- ports, les loisirs, les specta- cles , les fétes et tous les ‘autres aspects de la vie en société ou il y .a commu- nication entre personnes. El- le constitue en outre un des véhicules les plus importants de la culture, des traditions des sentiments et de la pen- sée. k La langue est une struc- ture et un environnement, tout comme l|’air ambiant. Quand il est sain, nous n’y portons pas attention mais, s‘il vient a manquer, nous en souffrons tous. Postface A une époque’ de dimi- nution de I‘espace vital et de polarisation extréme des opinions, le Canada demeu- re un des pays les plus exaltants du monde, au dou- ble point de vue matériel et des valeurs qu’on y dé- fend. Matériellement, la tache a accomplir est aussi énor- me que le pays est vaste, des régions nous sont enco- re mal connues, sauf peut- '@tre de certains autochto- nes. Avant de la réclamer notre, il nous faut le domestiquer. Nous en au- rions une bien piétre idée si nous le limitions 4 ce que nous en connaissons. Ce serait étroitesse d’esprit et infidélité 4 notre devoir que de le transmettre amputé a nos enfants. Le Canada jouit d'une excellente réputation a |’étranger grace notam- ment, a la richesse-.de ses ressources et a sa capacité de satisfaire les besoins ma- tériels essentiels de sa popu- lation. Nous en découvrons a peine les . potentialités. Les efforts individuels en- trepris pour les développer, si louables soient-ils, sont, a eux seuls, voués a |’échec; le climat, l’immensité du territoire et la complexité de notre société élevent des obstacles gigantesques. C’est plutét par la voie de la con- certation et de la ténacité. que nous ‘parviendrons a ap- profondir notre connaissan- ce du Canada pour en tirer le meilleur parti. Quant aux valeurs a sauve- garder, la taéche n’est pas arse etsy 01 VON Gt moins colossale ni moins exigeante. Le monde moder- ne est soumis a des forces centrifuges qui, si nous les laissons agir, sémeront la mésentente et la confusion. Les Canadiens doivent avoir une conception de la vie qui corresponde a la dimension méme de leur pays . Il leur faut aller au-dela des avantages matériels qu’ils en retirent et chercher sans . répit des accomodements rendant possible la cohabi- tation dans la paix, la sé- curité et le respect mutuel. Une société d’hommes li- bres se reconnait a ces si- gnes. Notre histoire collective nous a_ légué une des so- ciétés les plus tolérantes qui soit dans tous les domaines. Cette société admet la dissi- dence et accueille les dif- férences au point de ’courir le risque de laisser disparai- tre les conditions mémes d’expression de ces diver- gences. Mais les Canadiens se font un point d’honneur de cultive les originalités. Bon nombre d’entre eux ont pu craindre cependant pour leur identité personnelle et collective au sein d’un Cana- da uni. ll faut dire a ce sujet qu nous partageons avec tous les peuples de la terre le sentiment d’insécurité qui accompagne la sauvegarde de sa personnalité. Tout é- volue si vite que le change- ment est une des seules constantes de |’existence hu maine. En outre, I'aventure 3 UpRltt ave collective vécue jusqu’ici nous a trés bien préparés a affronter cette réalité. Nous ne sommes pas les derniers venus dans ce do- maine. En effet, les Canadiens ont toujours refusé de per- cevoir le pays et ses habi- tants comme des entités homogénes. Le Canada, en enont conclu hativement certains, n’aurait pas de vé- ritable originalité, les Cana- diens ne partageraient aucu- ne valeur commune et ils n’auraient méme pas le sen- timent d’étre concitoyens. Ces opinions, qui ont eu cours ces derniéres années, nous ont presque fait ou- — blier le trait distinctif de notre peuple. Notre aventure collective traduit un refus de l’unifor- mité et de l’homogénéité. L’‘affirmation et.le maintien des différences personnelles, sociales, locales, régionales, ont été le souci constant des Canadiens tout au long de leur histoire. Cette préoc- cupation fait leur singula- rité. L’unité nationale—plus réelle et profonde qu'il n‘y parait au premier abord— découle de notre détermina- tion a respecter la person- nalité de chacun. D’ou I’ex- ceptionnelle liberté dont nous jouissons chez nous. Les deux langues officiel- les et les nombreuses cultu- res du Canada sont |’expres- (4 suivre en page 8) 99 Nizeep oS 2 i “es hentai culturelles ou linguistiques