Le Moustique Volume3 - 1” édition Janvier 2000 eA rS Frédéric Chopin, le pus een grand pianiste de son temps. II révolutionna la technique du piano. Chopin aura été l'un des inventeurs de formes les plus singuliers de son temps. Retirant le scherzo de la symphonie, il en fera une @uvre autonome. Il composera des préludes sans suite. Portera le nocturne a son apogée. Créera la ballade instrumentale. Libérera I'harmonie de toutes contraintes, ouvrant une voie royale a Debussy, Fauré, Ravel, au jazz, qui s‘emparera de sa fameuse note bleue pour en faire sa marque de fabrique. Chopin osera la polyrythmie et la polytonalité, associera le modal et le tonal, dissoudra le sentiment de tonalité dans des ceuvres singuliéres, mouvantes et insaisissables (par exemple la fin du Prélude op.45). Quand il allait trés loin dans ce domaine - finale de la Sonate «funebre» -, il se défiait de toute explication par une litote : «Dans le finale les deux mains babillent a l'unisson.» Il y a cent cinquante ans disparaissait a Paris le musicien polonais, a l'age de trente-neuf ans. Mort de la tuberculose a Paris, le 17 octobre 1849, Frédéric Chopin est l'un des compositeurs les plus joués, les plus aimés du public depuis les années qui ont suivi sa disparition. Objet d'un culte qui ne s'est pas amoindri depuis un siécle et demi, sa tombe au cimetiére du Pére-Lachaise est quotidiennement fleurie par des mains anonymes. II symbolise la Pologne plus qu'aucun autre artiste, plus encore qu'Ignace Paderewski, pianiste spécialiste de Chopin, compositeur et chef d'Etat, signataire du traité de Versailles. La vie de Chopin a été racontée dans des dizaines de livres sérieux ou romancés, portée a l'écran de nombreuses fois, sa liaison avec Georges Sand sera disséquée, sa correspondance éditée - ce qu'il en reste, car de nombreuses lettres ont été perdues et George Sand a détruit toutes celles qu'elle avait adressées a son compagnon et qu'Alexandre Dumas fils avait retrouvées en Pologne. Si l'homme était aimé, Chopin était vénéré par les plus grands artistes de son temps. Il eut droit a des grandes funérailles a la Madeleine. On y joua le Requiem de Mozart, que l'on n'avait pas entendu a Paris depuis le retour des cendres de Napoléon, et une foule nombreuse suivit son cercueil jusqu'au Pére-Lachaise. Le compositeur Giacomo Meyerbeer conduisait le deuil. Théophile Gautier fut le reporter de cette cérémonie dans La Presse. Dans son journal, le peintre Eugene Delacroix parle de ses discussions a perte de vue avec son ami, de l'admiration qu'il lui porte. A la date du 20 octobre 1849, il écrit rageusement : «J'ai appris, aprés déjeuner, la mort du pauvre Chopin. Chose étrange, le matin, avant de me lever, j'étais frappé par cette idée. Voila plusieurs fois que j'éprouve de ces sortes de pressentiments. Quelle perte | Que d'ignobles gredins remplissent la place, pendant que cette belle dme vient de s’éteindre |» ...suite dans le prochain Moustique