a Chasseurs d'images par Roger Dufrane a Qui sommes-nous, sinon de grands enfants qui nous amu- sons aux multiples images que nous offre l’univers ? Images des écrans de télé- vision, des livres, des ca- méras, miniatures dentelées des timbres-poste, qui nous transforment en maniaques armés de pinces et de lou- pes, aquarelles des cartes de bon voyage et de bonne féte que nous échangeons en- tre amis. Quelle lubie m’a-saisi 4 la veille de lhiver d’entre- prendre une collection de cartes ‘Le souci d’occuper agréablement les soirs de pluie et de neige 4 passer au. coin du feu. Peut-étre aussi la nostalgie de l’en- fance od j’échangeais avec les petits copains les chro- mos cachés sous l’enveloppe des batons de chocolat. Il faut dire aussi qu’une im- pulsion m’a été donnée par un luxueux album des édi- tions Balland 4 Paris, paru en 1966, et qui reproduit dans un arrangement 4 la fois exquis et insolite des centai- nes de cartes datées de 1870 4 1925. ' Plusieurs pays figurent dans mon album personnel : l’Angleterre, la France, l’Allemagne, le Danemark, la Suisse, la Belgique, 1’Es- pagne, le Canada, les Etats- Unis, le Mexique, et méme la Chine traditionnelle. Cer- tes, je suis loin d’avoir vi- sité toutes ces contrées ; et jai recueilli la plupart de mes cartes sur le marché de Vancouver. Ot cela, de- mandera-t-on? Je l’ai ré- véele au lecteur en octobre dernier, 4 l’occasion d’une critique sur une exposition de cartes postales 4 la Ga- lerie d’art de 1’U.B.C. Je n’en dis pas plus, laissant aux chasseurs d’images 1’at- trait du jeu et le plaisir des longues fouilles. Pour me consoler de ne pouvoir faire le tour du mon- de, je voyage 4 travers les pages de mon album. Des. Anglais 4 l’humour un peu raide y cdtoient de sémil- lantes Mexicaines. Passent des mandarins A longues ro- bes et des princesses chi- noises au visage de porce- _laine. La truculence des Al- lemands recouvre de son gros rire. les allusions spi- rituelles des Francais. Et les Espagnols, se transpor- tant par le réve sur les canaux de Venise, y cam- pent un toréador 4 la pointe d’une gondole, admirant une languissante senorita quire- garde les étoiles papillonner dans l’eau. Ai-je donné la préférence aux cartes imprimées en Europe? Non pas. La beauté, la fantaisie et l’allégorie des images ont seules solli- cité mon choix. Or, par une rencontre toute fortuite, mes plus belles cartes provien- nent des Editions Dominique de Paris et Gordon Fraser de Bedford en Angleterre. Cette maison fait appel au talent d’illustrateurs pari- siens, de sorte que le quart de mes images sortent de la plume et du pinceau d’artis- tes francais. La plupart de mes cartes, si elles mettent enscéne des couples d’amoureux, les montrent sous le visage de l’enfance, tout en laissant percer sous les gestes des intentions d’ddulte, ce qui contribue au charme dugen- re. Certaines créations fri- sent la perversiteé, mais une perversité vétue de candeur et fleurie de roses. Et A cet égard, Am&ricains, Ca- nadiens et Allemands ne de- meurent pas en reste. Il peut paraftre ingénieux de chercher 4 travers nos car- tes postales le caractére foncier des nations d’ot el- les émanent. Mais prenons garde de généralisér ! Dans le domaine mouvant ét allé- gre de la carte postale, nul style, ni aucune nation, ne prédomine. Le seul critére qui vaille, c’est le prime- saut et le génie propre de l’artiste vibrant au diapa- son de notre époque. Voila notre album termi- né. Laissons sur la table du salon ces carrés de bris- tol qui ont occupé nos loi- sirs d’hiver. Désormais, des images plus réelles nous ‘sollicitent ; le Printemps qui commence 4 sourire dans les feuillages ; les oiseaux qui chantent, sur les fils du téléphone, leurs couvées en espérance ; la jeune fem- me dégagée des pelisses de l’hiver, et qui court, en mi- nijupe, peut-étre vers quel- que charmante aventure di- gne de prendre place dans le}. jardin rose et bleu des car- tes postales. Au Playhouse Le Playhouse Theatre a présenté la premiére mon- diale de la piéce de Merv Campone ‘‘ The Native’’ ven- dredi -dernier. ‘ha -piéce a comme théme les cultures minoritaires ot le groupe ‘supérieur’ a complétement isolé la culture primitive - pour saufgarder la pureté des deux. On examine les valeurs des cultures mino- ritaires et ce pourrait ¢tre n’importe quel groupe, mais dans cette adaptation on voit présentée une société trés primitive qui est essentiel- lement celle de 1J’indien nord-américain. M. Campone a été inspiré & écrire cette piéce par Chief Dan George et sa famille, dont l’amitié lui a mieux fait comprendre la culture indienne en particulier et. la culture minoritaire en gé- néral. D’aprés M. Campone, toute culture minoritaire offre des valeurs qui trop souvent sont rejetées ou diluées par la société au pouvoir. Il base sa piéce sur une prémisse abstraite...une culture indi- géne, totalement isolée, avec un Gardien qui a pour tache de maintenir cette isolation. De temps 4 autre on donne - droit a certains individus de laisser leur culture ou société ‘avancée’ pour la culture indigéne, et le per- sonnage central de la piéce est Joe, un de ces individus. Dans la piéce, un jeune hom- me de la culture supérieure renonce sa citoyenneté pour devenir un indigéne et ainsi regagner les simples va- leurs humaines depuis long- temps oubliées dans un état. Merv Campone par Pat Rose. Les te chnologiquement culture indigéne,. plus sa vie urbaine lui semble ridicule. La mise en scéne est de Neil Dainard, les costumes, qui d’ailleurs jouent un role- important dans l’atmosphére et 1’évolution de la piéce, sont de Cameron Porteous. sont de Cameron Porteous et la musique a été composée comé- avancée. - Plus il s’immerse dans la- dines sont Robert Clothier, -}). Len George, Stephen Markle, Elizabeth Murphy et David Foster, Pat John, Nick Man- cuso et Joe Sala. La piéce jouera jusqu’au | avril au Playhouse du Théatre Reine Elizabeth. E colecticaiinasseacs me VIII, LE SOLEIL, 17 MARS 1972,