héritage culturel. 12, Le Soleil de Colombie, 10 Octobre 1975 (Pure coincidence de chif- fre.) par Léon HURVITZ Mesdames & Messieurs, Lors de ma derniére vi- site 4 San-Francisco, j’ai eu une réunion avec un Japonais qui m’avait en- seigné sa langue dans une école militaire américaine pendant la Deuxiéme Guer- re Mondiale. Au cours de mon séjour, ilm’amena aux bureaux d’un_ fournal quo- tidien japonais, dont il ya plusieurs dans cette ville. Lorsqu’il me présenta 4 un membre de l’@quipe du journal, celui-ci s’adres- sa a moien un anglais ty- piquement americain. - **Parlez-lui en japonais’’, de lui dire mon ancien pro- fesseur. Grace a moi, il le comprend assez bien’’. Aussitdt, ce monsieur commenc¢a a me parler en un japonais tout aussi ex- cellent que son anglais. Evidemmentune communau té minoritaires mais assez grande, publie dans une ville majoritairement an- glophone, un journal quo- tidien, en une langue non- anglaise. Cette circons - tance n’anglicise pas le journal, ni ne japonise la ville non plus. Entre eux, les membres de l]’équipe du journal se parlent en ja- ponais. Quand il leur faut s’adresser au gouverne- ment, soit de la ville, soit du comté, soit de~]’Etat, ils le font en anglais, le porte-parole étant un membre bilingue de 1’équi- pe. Méme si les Japonais locaux étaient plusieurs fois plus nombreux etplus riches qu’ils ne le sont, la ville de San - Francis- co ne cesserait pas, pour autant, d’étre une ville anglophone. Pour ‘*San Francisco’’, lire ‘*Montréal’’; pour ‘‘anglais’’, ‘‘frangais”’ —; pour ‘‘japonais’’, ‘‘an- glais’’. La comparaison ne serait pas, pour autant, honnéte. Car le gros agent californien ne se trouve pas dans les mains des Japo - nais, tandis qu’au Québec, surtout 4 Montréal, ce sont les anglophones qui contro- lent la vie €conomique. M. Bourassa, s’il avait le cou- rage - et si le Parti Libé- ral le permettait! - devrait dire aux anglophones’ de bonne volonté (et ils exis- tent, méme au Québec), : “*Ecoutez, chers amis! - Vous savez ce que c’est que d’étre en minorité. Ce que vous étes ay Québec, nous le sommes en Amérique du Nord. Il ne s’agit pas que-de notre langue maternelle, que nous aimons tout aussi vivement que vous aimezla votre. Ils’agit de notre vie, en tant qu’entité culturelle. Nos écoles doivent —étre francophones, et méme aux anglophones, il faut ensei- gner le frangais 4 un haut niveau. Sinon, notre Qué- bec’ ne sera plus le ndtre. Nous n’interdisons nulle- ment 4 nos.concitoyens an- glophones. de maintenir leur langue et, par 14, leur ae) +> As Phe: Nous BILL 22/CATCH22 leur disons, toutefois, qu’ étant majoritaires, nous avonscertains droits de majorité, lesquels nous comptons exercer, d’autant plus qu’y renoncer . é- quivaudrait au suicide cul- turel’’. ; Aux bigots anglophones (qui existent, hélas!, eux aussi) il faut dire: ‘‘Nous autres, quand nous vivons dans vos provinces, il nous faut nous accommo- der de votre langue et de vos coutumes. Vous choi- sez de vivre au Québec. Tirez-en les circonstances logiques! Siles grandes so- ciétés: nous disent qu’elles se déplaceront avant de se soumettre aux ‘‘frogs’’, nous leur rétorquons que nous ne céderons pas a cette espéce de chantage’’. Je ne m*imagine pas que, ce disant, M. Bourassa ré- soudrait tous les proble - mes. I] reste le British North America Act, lequel, ne permettant pas au Gou- vernement. Fédéral de s’occuper de 1’éducation, entrave le développement du bilinguisme. II reste aussi l’anachronisme de Vécole confessionnelle au Québec. Car, si inviolable que soit le droit des fidéles de n’importe quelle reli - gion de maintenir leurs écoles confessionnelles, ils n’ont pas, &mon a- vis, le droit de les impo- ser au grand public, sur- tout a ]’Etat. La plus grande question, c’est si Pon peut-recom - mander un tel cours d’ac- tion a un politicien qui se vante de sa foi en la. ‘libre entreprise’’ et du soutien qu’y apportent la province de Québec et son gouvernement. Qu’est-ce qui fait le plus de peur aux Libéraux québécois, le suicide culturel ou Ja fuite des capitaux. Il faut ajouter que je dac- tylographie tout en écou:- . tant la radio francophone et que, maintenant, je vais me consacrer 4 la lecture de: la sélection hebdomadaire du ‘*Monde’”’ de Paris. - SS "1 ¢, Ln Ad 4 a Abonnez-vous et Réveillez-vous au SOLEIL” NOS LECTEURS. Lefrancais langue de travail A la Rédaction du Soleil - Décidément, la loi 22, a- doptée par le gouvernement du Québec pour préserver Videntité linguistique de la province, fait couler beau- coup d’encre. Je ne verrais rien de mauvais en cela, si la loi en question suscitait - une discussion construc- tive a travers le pays, mais cela ne semble mal-~ heureusement pas étre_ le cas. M. Marc Béliveau nous -apprend, dans son éditorial du 19 septembre, qu’il se trouve des anglophones aux yeux desquels la loi 22 an- nonce la fin de l’existence du Québec 4 Vintérieur du Canada. Et pourtant, quand on y regarde de pres, on s’apercoit bien vite que c’est une loi typiquement libérale: c’est - a- dire qu’elle manque d’envergu- re et d’épine dorsale, qu’elle contient des échap- patoires qui offrent bien des possibilités de s’y dé- rober. M. Choquette, avec lequel je ne suis pas nor - malement d’accord, avait raison d’insister qu’on li- mite l’accés 4 |’éducation en: anglais aux enfants de méres anglophones et qu’on envoie les autres dans les écoles francaises. Par ail- Jeurs, tant que l’économie continuera 4 parler an- glais, tant que le francais ne -deviendra pas la langue du travail, la loi 22 ne sau- rait aboutir 4l’objectif dé- siré; celui de la survie du Canada francais. Mais je crois, hélas! que cela —ne- soit trop en demander aux Copyrient $.0.P. ~~) (BIL 22 politiciens libéraux, notoi- res par leur absence de ré- solution et par leur inféo- dation aux intéréts écono - miques américains. Etant personnellement multilingue et partisan de la diversité culturelle, mon souhait le plus fervent serait de voir un Canada bi- lingue, - qui n’empécherait cependant pas la mosaique ethnique du troisiéme tiers de notre population des’é - panouir culturellement. I] découle de cela que je n’é- prouve aucune pitie pour ceux des anglophones qui persistent a se vautrer dans l’ignorance unilingue et l’esprit orangiste par leur rejet du fait francais au Canada, et aussi que je n’éprouve aucune sympa- thie pour les immigrants i- taliens et autres, quis’ins- tallent au Québec et refu- sent d’en apprendre la lan- gue: c’est la faire montre d’une insolence de colon “qu’aucun pays, a notre é- poque, ne saurait suppor - ter. Car, en fin de compte, “Je Québec est francophone, comme 1]’Ontario et la Co- lombie sont anglophones et -son gouvernement aenti¢e- rement raison de vouloir contraindre les * immi- grants qui S*y établissent a éduquer leurs enfants en francais, surtout quand la survie culrurelle du Québec est menacée par l’afflux de gens qui choisissent de s’assimiler a sa minorité janglophone. Qu’on dise done aux immigrants: vous voulez vivre au Québec, ap- NOUS ECRIVENT prenez donc le francais; si- non, allez vous. établir en Ontario, dans le Manitoba ou dans ]’Ouest, ou méme aux Etats-Unis, car Dieu sait que le monde ne man- que pas de pays anglopho- nes. 3 Finalement, pour que la société minoritaire anglo- phone du Québec cesse d’étre ce cancer qui’ croft aux dépens de la majorite francophone qu’il abrite, il faudrait, comme je 1’aidéja souligné, non seulement que le Quebec se pourvusse de dirigeants d’une cnver- gure autre que le minable Bourassa, que le frangais devienne langue de travail et qu’oncomble les lacunes de la loi 22, mais aussique les Québécois se libérent de leur étroitesse d’esprit, de leur complexe d’infério- rite et de colonisés, tares. qui rendent la societé fran - cophone du Canada _ si in- hospitaliére, ‘alors que la société anglophone est si largement ouverte. - René Goldman Vancouver - En pleine forme, Ton fait tout, tout... beaucoup - mieux. a PARTIOIPACTION